GrĂąceĂ huit Ă©missions de France Culture, rĂ©visez vos connaissances philosophiques sur la notion de vĂ©ritĂ©, jusque dans ses acceptions trĂšs contemporaines. La vĂ©ritĂ© est la correspondance entre ce que je dis, et ce qui est : elle sâoppose donc Ă la faussetĂ© â au sens dâerreur, mais aussi de mensonge. DĂ©tenir la vĂ©ritĂ©, cCe mot de "vĂ©ritĂ©", il me semble, pose des problĂšmes par sa dĂ©finition trĂšs variable d'un point de vue Ă l'autre. DĂ©jĂ , dans la sociĂ©tĂ©, il y a la vĂ©ritĂ© scientifique, la vĂ©ritĂ© historique, la vĂ©ritĂ© juridique, la vĂ©ritĂ© religieuse, ou plutĂŽt les vĂ©ritĂ©s religieuses puisqu'il y en a autant que de religions. Bien sĂ»r c'est en contradiction mĂȘme avec le sens du mot, puisque par dĂ©finition, il ne peut en exister qu'une ce qui n'est pas vrai est faux ! Dans ce que vous avez pu dire, on est dans l'ensemble d'accord que ce qui approche le mieux la vĂ©ritĂ© est la vĂ©ritĂ© scientifique. Parfois religieuse, mais lĂ , pour un forum scientifique, j'en ai perdu mes cheveux ! Ensuite, le mot peut s'appliquer Ă beaucoup de choses, et l'approche gĂ©nĂ©raliste brouille un peu les cartes. On peut parler d'Ă©vĂšnement, de faits, de comportements, de thĂ©ories... et mĂȘme d'un mĂ©lange de tout cela. D'oĂč peut-ĂȘtre l'usage des mots d'objectivitĂ©, d'inter-subjectivitĂ© pour ĂȘtre plus prĂ©cis. Ce sont des notions implicites Ă la dĂ©marche scientifique. Enfin, pour le mot science, il y a aussi une distinction Ă faire, entre le domaine de la recherche active et de l'inconnu, pour lesquels nous n'avons pas une vision aboutie, du domaine scientifique maitrisĂ©, sur lequel il n'y a plus de doutes. Il y a un exemple plus bas pour justifier qu'il y a bien des domaines scientifiques aboutis, car j'ai bien notĂ© dans les discussions que pour beaucoup le doute Ă©tait omniprĂ©sent. Sur un plan plus concret, moins philosophique, je pense que la science a derniĂšrement permis Ă l'homme de faire un pas de plus vers la vĂ©ritĂ©, ou bien un pas de moins vers l'obscurantisme ! C'est au niveau du systĂšme judiciaire et de la crĂ©ation de la police scientifique. D'une part, le relevĂ© des faits, des Ă©vĂšnements se fait avec bien plus de rigueur, de nouveaux moyens de mesure - dont l'ADN, les empreintes digitales, ... - permettent d'ĂȘtre bien plus confiants sur la vĂ©racitĂ© de ce qui a Ă©tĂ© constatĂ©. Ils donnent parfois un taux chiffrĂ© de confiance, ce qui a eu un effet dĂ©terminant pour ĂȘtre mieux pris en compte par ceux qui jugent jurĂ©s inclus. D'autre part, au moment du jugement, cette prise de confiance envers la science permet de sortir petit Ă petit de la doctrine du tĂ©moignage, de laquelle nous ne sommes pas encore totalement sorti, tant il est rassurant, pour celui qui juge, d'avoir un aveu, ou des personnes qui disent avoir vu ! Car pour le tĂ©moignage, si un taux de confiance devait lui ĂȘtre donnĂ©, celui-ci serait probablement plus prĂšs des 50% =random que des 100% ! Qu'Ă fait la science pour cela ? Elle a pu Ă©tablir des moyens de relevĂ© et de mesure, et une mĂ©thodologie qui complĂštent et dĂ©passent peu Ă peu la confiance accordĂ©e aux tĂ©moignages. Il s'agit d'un champ d'application de la science qui est maitrisĂ©, sur lequel nous n'avons plus de doute et nous ne reviendrons plus. En effet, je ne vois pas comment, Ă l'avenir, on pourrait remettre la pertinence des empreintes digitales ou comparaisons ADN en doute. Cela ne concerne pas le domaine de la recherche active, sur laquelle nous n'avons pas ces certitudes. Ici, la science permet de faire moins d'erreurs. Alors si la science peut venir en aide pour la "vĂ©ritĂ©" juridique, est-ce qu'elle ne le pourrait pas dans d'autres domaines ? Est-ce que les scientifiques ne pourraient pas Ă©viter des erreurs lorsque l'on vote des budgets par exemple ? Je pense bien sĂ»r au domaine politique dans lequel non seulement la recherche d'objectivitĂ© n'est que trĂšs secondaire, mais surtout que des intĂ©rĂȘts individuels influent sur les prises de dĂ©cision. Car s'il y a un domaine oĂč l'erreur est quasiment omniprĂ©sente, c'est bien la politique. Quel est le taux des budgets respectĂ©s, et d'assiette non nĂ©gative ? Je verrais bien une commission scientifique lĂ -dessus. Ceci pour dire que la science peut nous aider sur un plan Ă©pistĂ©mologique, par la recherche active, mais aussi sur un plan plus concret, de tous les jours, sur le plan de la connaissance acquise. RenoncerĂ l'idĂ©ale de vĂ©ritĂ©, ce n'est pas douter ; c'est renoncĂ© Ă rechercher la vĂ©ritĂ©, Ă penser, Ă s'interroger, Ă reconnaĂźtre la pensĂ©e rationnelle comme capable d'Ă©laborer des vĂ©ritĂ©s universelles. Mots clĂ©s âą douter : ĂȘtre dans l'incertitude, hĂ©siter, soupçonner.
RĂ©sumĂ© du document dissertation philosophique niveau Terminale Tout d'abord, pour l'opinion commune, douter est un choix permettant de renoncer Ă la vĂ©ritĂ©, vĂ©ritĂ© unique. Douter des vĂ©ritĂ©s Ă©tablies sans preuves c'est remettre en cause leur fondement, leur caractĂšre de vĂ©ritĂ© absolue. Ensuite, pour les philosophes, douter n'est pas renoncer Ă la vĂ©ritĂ© car douter c'est rechercher la vĂ©ritĂ©, mettre en doute chaque vĂ©ritĂ© connue pour garder la plus juste des vĂ©ritĂ©s car il n'existe pas une mais plusieurs vĂ©ritĂ©s. Sommaire I Douter c'est renoncer Ă la vĂ©ritĂ© II Douter c'est faire de la vĂ©ritĂ© sa propre vĂ©ritĂ© Extraits [...] L'homme prĂ©fĂšre douter que de se trouver face Ă la rĂ©alitĂ©, renonçant ainsi Ă la vĂ©ritĂ©. De plus, arrivĂ© Ă un Ăąge mĂ»r, l'homme commence Ă se poser de nombreuses questions, Ă remettre en cause l'enseignement qu'on lui a apportĂ© ainsi que les vĂ©ritĂ©s lĂ©guĂ©es. Il s'effectue alors une remise en question de la plupart de ces vĂ©ritĂ©s et il arrive souvent que cet homme ne soit pas d'accord avec ces vĂ©ritĂ©s enseignĂ©es. C'est pourquoi, elle va renoncer Ă la vĂ©ritĂ© enseignĂ©e, celle de son enfance pour s'en rĂ©approprier une autre. [...] [...] Douter, est-ce renoncer Ă la vĂ©ritĂ© ? Tout d'abord, pour l'opinion commune, douter est un choix permettant de renoncer Ă la vĂ©ritĂ©, vĂ©ritĂ© unique. Douter des vĂ©ritĂ©s Ă©tablies sans preuves c'est remettre en cause leur fondement, leur caractĂšre de vĂ©ritĂ© absolue. Ensuite, pour les philosophes, douter n'est pas renoncer Ă la vĂ©ritĂ© car douter c'est rechercher la vĂ©ritĂ©, mettre en doute chaque vĂ©ritĂ© connue pour garder la plus juste des vĂ©ritĂ©s car il n'existe pas une mais plusieurs vĂ©ritĂ©s. Et, c'est simplement notre conscience qui choisit sa vĂ©ritĂ©, qui dĂ©tient une idĂ©e comme sa vĂ©ritĂ©. [...] [...] Or, en dehors du domaine des sciences oĂč tout est rigoureux, calculĂ©, dans lequel il n'existe qu'une seule maniĂšre de dĂ©montrer telle ou telle chose, cela est souvent impossible car chacun pense diffĂ©remment et n'aura pas la mĂȘme croyance, opinion, idĂ©e qu'une autre personne. Chacun doute constamment par mĂ©fiance, il est ainsi naturel de tout remettre en question et de se rĂ©approprier les vĂ©ritĂ©s communes. On doute de la vĂ©ritĂ© tant qu'elle n'a pas Ă©tĂ© prouvĂ©e, dĂ©montrĂ©e. En doutant on renonce donc Ă la vĂ©ritĂ© proposĂ©e. En effet, le sceptique doute car il ne peut rĂ©ussir Ă rĂ©pondre Ă la question posĂ©e mais aussi parce qu'il a renoncĂ© Ă trouver la vĂ©ritĂ© et donc finalement Ă la vĂ©ritĂ© elle-mĂȘme. [...] [...] AprĂšs avoir dĂ©montrĂ© les opinions et choisit la vĂ©ritĂ©, l'homme est capable d'argument son choix. En effet, comme le dit Descartes Discours de la mĂ©thode les choses que nous concevons fort clairement et distinctement sont toutes vraies. Le doute, renoncement au dogmatisme, permet l'ouverture Ă la vĂ©ritĂ©. En conclusion, il existe deux sortes de doute le doute sceptique qui s'analyse comme un renoncement Ă la vĂ©ritĂ©, adoptĂ© par la doxa et le doute mĂ©thodique qui permet la recherche de la vĂ©ritĂ© par le refus temporaire des opinions, adoptĂ© par les philosophes. [...] [...] C'est donc la recherche de la vĂ©ritĂ© et non pas son renoncement qui amĂšne le doute. C'est donc en doutant que l'on peut renoncer Ă la non-vĂ©ritĂ© et trouver la vĂ©ritĂ©. Ceci est illustrĂ© par le mythe de la caverne de Platon dans laquelle des hommes qui voyaient des ombres ont Ă©tĂ© trompĂ©s car ce qu'ils voyaient et qu'ils tenaient pour vrai n'Ă©tait pas le rĂ©el mais simplement une apparence. Les sens nous induisent souvent en erreur nous donnant pour vraie une vision fausse de la rĂ©alitĂ©. [...]44Fairede la logique mathĂ©matique la rĂ©fĂ©rence de la vĂ©ritĂ©, faire dâun savoir bien particulier la rĂ©fĂ©rence Ă la vĂ©ritĂ©, câest sans doute ce Ă quoi se rĂ©fĂšre Lacan dans le passage sur le non-su de sa « Proposition » Cette « Proposition », il faut bien sâapercevoir quâelle nâest pas sous le rĂ©gime de la premiĂšre distinction vĂ©ritĂ©/savoir. Elle nâest pas
IntroductionDouter, c'est d'abord ĂȘtre dans une incertitude telle qu'elle nous fait hĂ©siter sur le parti Ă prendre ou l'opinion Ă adopter. Quand je doute, je ne sais que faire ni que penser, en sorte que mon jugement se trouve comme suspendu. Tout le temps que dure le doute en effet, ma volontĂ© ne parvient pas Ă se dĂ©cider tant que je ne renonce Ă aucune des alternatives qui s'offrent Ă moi, c'est en fait Ă l'acte mĂȘme de juger que je renonce. Car enfin, juger, c'est affirmer ou nier, ce qui implique que ma volontĂ© sorte de l'embarras du choix, tranche et se dĂ©cide. Mais c'est prĂ©cisĂ©ment lorsque je veux m'assurer de bien choisir, c'est-Ă -dire de ne pas me tromper, que le doute s'empare de moi et me paralyse je retiens mon jugement tant que me font dĂ©faut les informations nĂ©cessaires ou les raisons me permettant de dĂ©cider. En ce sens donc, celui qui doute redoute par-dessus tout l'erreur et aspire Ă ĂȘtre dans le vrai, et c'est prĂ©cisĂ©ment parce qu'il ignore ce qu'il en est, en vĂ©ritĂ©, qu'il se met Ă douter. Le doute alors, loin de nous faire renoncer Ă la vĂ©ritĂ©, serait au contraire un passage obligĂ© pour celui qui, comme le disait Descartes, refuse de se dĂ©cider pour de faibles raisons ».Cependant, lorsqu'un doute me saisit, je me trouve bien dans une situation telle que ce que je tenais pour vrai se trouve Ă©branlĂ© ; il est alors possible que je doive y renoncer, c'est-Ă -dire accepter de m'en dĂ©faire. Mais renoncer Ă ce que je tenais pour vrai, est-ce renoncer Ă la vĂ©ritĂ© en elle-mĂȘme ? Quand le doute s'installe en mon esprit, ne suis-je pas prĂ©cisĂ©ment en mesure de rĂ©former ma pensĂ©e et de me dĂ©faire de mon erreur Ă©ventuelle, progressant ainsi vers la vĂ©ritĂ© ? C'est ici que le doute acquiert sa valeur proprement philosophique. D'une hĂ©sitation embarrassĂ©e dictĂ©e par la prudence, d'une incertitude subie qui attend de pouvoir se dĂ©cider, le doute est en mesure de devenir non plus passif et indĂ©sirable, mais actif et volontaire, lorsque je dĂ©cide d'examiner mes croyances â de les remettre en doute, Ă©tape douloureuse s'il en fut, mais nĂ©cessaire Ă qui du moins recherche la vĂ©ritĂ©. Il ne s'agit plus ici de refuser de trancher sans raisons suffisantes, mais d'examiner les raisons pour lesquelles habituellement nous tranchons, c'est-Ă -dire douter de ce dont, dans le cours ordinaire de la vie » pour reprendre une autre expression cartĂ©sienne, nous ne doutons justement dĂ©cidant alors d'abandonner mes vĂ©ritĂ©s et de les mettre en doute, il semblerait que, loin de cesser de prĂ©tendre au vrai, j'emprunte le seul chemin qui me permette de l'atteindre avec assurance ; mais encore faut-il que la vĂ©ritĂ© ne m'apparaisse pas comme un vain mot, et l'accĂšs Ă cette derniĂšre comme une impossibilitĂ© si le doute est en effet appelĂ© Ă se prolonger, c'est Ă la vĂ©ritĂ© elle-mĂȘme que je devrai alors renoncer â faire du doute non plus une Ă©tape, mais un Ă©tat destinĂ© Ă demeurer le nĂŽtre, c'est de fait poser qu'il faudra se passer de la vĂ©ritĂ© elle-mĂȘme, et rĂ©puter par avance vaine sa recherche. Lorsqu'en effet le doute s'installe et perdure, lorsqu'il m'amĂšne non pas Ă peser mon jugement et Ă examiner la validitĂ© de mes raisons, mais Ă renoncer Ă tout jugement, n'est-ce pas Ă la vĂ©ritĂ© elle-mĂȘme qu'il renonce ?I. Le doute comme chemin jusqu'au vraiDans ce que Husserl nommait notre attitude naturelle », nous cherchons toujours Ă lever le doute s'il nous arrive de douter de quelque chose ou de quelqu'un, si tel propos peut parfois nous sembler douteux ou telle attitude suspecte, alors nous nous employons Ă mettre un terme Ă notre hĂ©sitation en trouvant des raisons de trancher. Dans notre vie quotidienne, le doute nous est par consĂ©quent imposĂ© comme de l'extĂ©rieur, il ouvre dans nos certitudes une faille qu'il s'agit de rĂ©sorber au plus vite le monde de l'attitude naturelle est en fait un monde d'oĂč tout doute doit ĂȘtre exclu, un monde oĂč si nous subissons parfois les affres de l'incertitude, ce n'est jamais de nous-mĂȘmes, de nos opinions et de nos jugements que nous doutons. Notre mouvement premier, par consĂ©quent, c'est justement de ne pas remettre en doute ce que nous-mĂȘmes tenons pour vrai ce pourquoi, d'abord et le plus souvent, ce sont des prĂ©jugĂ©s qui nous tiennent lieu de raisons, lesquels sont Ă vrai dire d'autant plus douteux que nous n'en doutons pas. Ainsi, il ne viendrait Ă l'idĂ©e de personne de se demander si nos certitudes naturelles » sont bel et bien fondĂ©es le monde est tel que je le perçois et tel que je le pense, sans qu'il faille m'interroger davantage sur les fondements de cette belle certitude, que Husserl nomme la thĂšse du monde ». Le monde extĂ©rieur existe, et il est en soi ce qu'il est pour moi cette thĂšse a l'Ă©vidence de ce qui va de soi, et dont nul ne songerait Ă douter, Ă moins d'ĂȘtre un qu'est-ce qui vient justifier cette conviction subjective ? AprĂšs tout, et comme le montrait Descartes, il se pourrait fort bien que ce monde mĂȘme, et tout ce qu'il renferme, ne soit que le produit d'un songe bien liĂ© », et qu'il n'ait pas plus de vĂ©ritĂ© que les illusions de mes songes. Rien ne m'assure qu'il existe bien quelque chose hors de moi, que ma pensĂ©e est conforme Ă un objet extĂ©rieur Ă elle ; et si j'en suis convaincu au point de ne jamais chercher Ă fonder cette conviction en raison, c'est nul doute parce que je suis moins prĂ©occupĂ© par la recherche de la vĂ©ritĂ©, que par la nĂ©cessitĂ© d'agir et d'Ćuvrer. Tel est le sens de la morale par provision » chez Descartes si rien ne m'assure que mes certitudes subjectives les plus fondamentales sont effectivement fondĂ©es, et si le plus souvent je ne m'en soucie guĂšre et ne pense pas l'insuffisance de leurs fondements comme une objection propre Ă retenir mon attention, c'est parce que je suis d'abord tenu par l'urgence de l'action. Ă mĂȘme la vie quotidienne, il n'est guĂšre temps de suspendre notre jugement, de douter de tout dans l'espoir de dĂ©gager des fondations solides Ă l'Ă©difice du savoir le temps de la vie quotidienne n'est pas le temps de la recherche de la vĂ©ritĂ©, lequel rĂ©clame de mettre un terme Ă notre pourtant au cĆur mĂȘme de cette existence quotidienne que le doute parfois nous saisit ce que j'aurais jurĂ© ĂȘtre vrai s'est rĂ©vĂ©lĂ© faux, j'ai fait une erreur grossiĂšre, je me suis lourdement trompĂ©. Or, l'expĂ©rience de l'erreur n'est autre que celle de l'insuffisance de nos certitudes subjectives il ne suffit pas d'ĂȘtre convaincu pour ĂȘtre dans le vrai â en d'autres termes, la certitude subjective de la conviction n'est pas la certitude objective du savoir. Quand je me trompe, c'est l'erreur qui me semble vraie je ne me trompe qu'en Ă©tant certain de mon fait, sans quoi je me corrigerais de moi-mĂȘme, en sorte que la plus simple erreur deviendrait impossible. Quand je me trompe autrement dit, je ne sais pas que je me trompe ; par consĂ©quent, je puis me tromper bien plus souvent que je ne le crois, en sorte que mes convictions se trouvent frappĂ©es d'un indice de pourquoi le doute apparaĂźt comme Ă©tant le geste philosophique primordial, par lequel nous nous mettons en quĂȘte de la vĂ©ritĂ© si d'habitude nous ne la cherchons guĂšre, c'est parce que nous sommes convaincus de la dĂ©jĂ possĂ©der ; mais lorsque cette conviction mĂȘme s'avĂšre douteuse, quand la validitĂ© de mes certitudes se trouve remise en cause, alors il me faut suspendre mon jugement le temps de trancher. Socrate est ainsi parfois comparĂ© Ă un poisson-torpille, cette raie Ă©lectrique dont la dĂ©charge plonge sa victime dans la torpeur et la sidĂ©ration lors mĂȘme que son interlocuteur est d'emblĂ©e persuadĂ© de dĂ©tenir la vĂ©ritĂ©, Socrate fait en quelques questions voler en Ă©clats ses belles certitudes, et le laisse dĂ©muni. MĂ©non est certain de savoir ce qu'est la justice ; LachĂšs, ce gĂ©nĂ©ral courageux, pense pouvoir facilement produire une dĂ©finition du courage ; tous deux quitteront pourtant Socrate en ayant abandonnĂ© lĂ leurs convictions. Si parfois le dialogue se poursuit jusqu'Ă l'obtention d'une dĂ©finition valide, il arrive souvent qu'il se referme sans qu'une solution ait Ă©tĂ© trouvĂ©e Ă la question initiale sommĂ© par l'autre de dire ce qu'est en vĂ©ritĂ© la justice, ou le courage, Socrate alors affirme n'en rien savoir ; mais mieux vaut savoir que l'on ne sait pas, que de croire savoir ce qu'en fait on ignore. C'est donc bien mal Ă propos que nous vivons difficilement l'Ă©preuve du doute, en ceci qu'elle nous force Ă abandonner nos prĂ©jugĂ©s une telle perte est en soi un gain, car l'opinion infondĂ©e n'est pas seulement une erreur, un dĂ©faut de vĂ©ritĂ©, mais bien un obstacle qui nous dispense de sa recherche â ne peut chercher la vĂ©ritĂ©, que celui qui sait ne la point possĂ©der Du doute sceptique Ă la solution kantienneNous comprenons alors pourquoi Descartes peut faire du doute l'instrument mĂȘme de sa mĂ©thode remettre tout en doute jusqu'Ă trouver ce dont nul ne peut douter, voilĂ la seule solution pour qui cherche Ă donner un fondement indubitable au savoir. Le doute cartĂ©sien est donc aussi exagĂ©rĂ© que provisoire il faut faire comme si l'ombre d'un doute suffisait Ă rendre un jugement faux, mais cette exagĂ©ration mĂȘme permet de dĂ©gager la certitude absolue du cogito, je pense, donc je suis ». Quand bien mĂȘme toutes mes pensĂ©es seraient fausses, et fausses toutes mes certitudes, celle-lĂ demeurerait intacte pour se tromper, il faut penser, en sorte qu'il est indubitable que j'existe en tant que chose qui pense. Cette certitude premiĂšre va nous permettre, selon Descartes, de rebĂątir l'Ă©difice du savoir sur des fondements certains le doute, en dĂ©truisant nos convictions subjectives, nous permet de dĂ©gager ce qui est vĂ©ritablement indubitable. Le cogito devient alors le modĂšle mĂȘme de la vĂ©ritĂ©, auquel nous pourrons comparer toutes nos autres idĂ©es celles qui seront aussi claires et distinctes que lui seront nĂ©cessairement comprenons Ă©galement ce qui sĂ©pare le doute cartĂ©sien du doute sceptique pour les sceptiques prĂ©cisĂ©ment, le doute n'est pas l'instrument de la recherche de la vĂ©ritĂ©, il n'est pas une Ă©tape provisoire sur le chemin menant Ă la certitude, mais un Ă©tat qui doit ĂȘtre maintenu tant que durera notre vie. J'existe, j'Ă©prouve telle ou telle affection hors de cela, rien n'est certain, en sorte que c'est la vĂ©ritĂ© mĂȘme qui doit ĂȘtre rĂ©putĂ©e dĂ©finitivement hors de notre portĂ©e. On ne peut ni dire que la vĂ©ritĂ© existe, ni qu'elle n'existe pas, parce qu'on n'en peut rien dire du tout, voire parce qu'on ne peut rien dire du tout. Toute parole qui exprimerait autre chose qu'un Ă©tat interne doit ĂȘtre suspendue, comme tout jugement portant sur autre chose qu'une sensation. Je peux bien dire que j'ai froid dans l'eau, mais non que cette eau est froide un autre la trouverait tiĂšde, un pingouin la trouverait chaude. Les dix modes sceptiques, tels qu'ils sont exposĂ©s par Sextus Empiricus, sont destinĂ©s Ă produire une isostĂ©nie systĂ©matique des jugements toute proposition peut se voir opposer une proposition contraire tout aussi vraisemblable, en sorte que toute dĂ©cision touchant la vĂ©ritĂ© doit ĂȘtre suspendue. Tout jugement est ainsi relatif Ă celui qui juge la porte est fermĂ©e pour le chien, mais ouverte pour le moustique qui n'est pas arrĂȘtĂ© par si peu argument de la variĂ©tĂ© des animaux ; tel trouvera cette saveur douce, tel autre amĂšre argument de la variĂ©tĂ© des individus. Tout jugement est Ă©galement relatif Ă ce qui est jugĂ© un grain de sable paraĂźtra rugueux au toucher, une poignĂ©e de sable semblera douce, etc. En consĂ©quence, il est impossible d'Ă©noncer quelque vĂ©ritĂ© absolue que ce faut-il faire du doute une Ă©preuve provisoire, ou une suspension continue du jugement ? Il revient Ă Kant d'avoir renvoyĂ© dos Ă dos les dogmatiques, pour qui la raison peut parvenir Ă la certitude en toute chose, et les sceptiques pour qui rien n'est jamais certain on est passĂ© de trop de confiance accordĂ©e aux pouvoirs de la raison, Ă trop de dĂ©fiance. En d'autres termes, si nos facultĂ©s de connaĂźtre ne peuvent pas tout dĂ©montrer, il serait faux d'affirmer qu'elles ne peuvent rien dĂ©montrer du tout. Pour connaĂźtre, en effet, il faut un contenu qui nous est fourni par l'intuition ou expĂ©rience sensible, et un concept qui nous vient de notre entendement ; lorsque les deux sont rĂ©unis, alors la connaissance est effectivement certaine. Cependant, cette conjonction heureuse n'est pas en soi toujours possible il existe des idĂ©es de notre pensĂ©e dont nous ne pouvons avoir aucune intuition. Ainsi, par exemple, nous avons bien un concept de Dieu, ĂȘtre Ă©ternel et ubiquitaire ; mais prĂ©cisĂ©ment, toute perception ne peut avoir lieu que dans le temps et dans l'espace. De lĂ , il ressort que nous ne pouvons pas avoir une intuition sensible de Dieu notre concept de Dieu est destinĂ© Ă demeurer vide Ă jamais, en sorte que si nous pouvons bien penser Ă un ĂȘtre divin, nous n'en pouvons rien connaĂźtre et ne pourrons jamais dĂ©montrer son existence pas plus, au reste, que son inexistence.Il n'y a de connaissance que dans les limites de l'expĂ©rience possible la connaissance peut bien ĂȘtre certaine, mais tout ne peut pas ĂȘtre connu, en sorte que les dogmatiques et les sceptiques ont tous Ă©galement tort. Tout n'est pas douteux, mais nous ne pouvons acquĂ©rir sur toutes nos idĂ©es une certitude indubitable le savoir est rĂ©el, mais il est limitĂ©. ConclusionLors mĂȘme que le doute sceptique nous conduisait Ă renoncer Ă la vĂ©ritĂ© elle-mĂȘme et posait qu'il fallait bien nous en passer, l'idĂ©alisme cartĂ©sien affirmait finalement que le doute n'Ă©tait nĂ©cessaire que pour autant qu'il Ă©tait provisoire une fois dĂ©gagĂ© l'indubitable, c'est Ă la recherche de la vĂ©ritĂ© qu'il fallait passer. Kant nous a permis de renvoyer dos Ă dos, comme deux excĂšs, ces deux attitudes le doute n'est pas une fin en soi, mais il ne saurait ĂȘtre considĂ©rĂ© comme une simple Ă©tape sur le chemin de la certitude, parce que les objets qui outrepassent les limites de notre connaissance demeureront Ă jamais douteux. Comme le disait Husserl, le doute est le geste fondamental pour qui s'enquiert de vĂ©ritĂ©, prĂ©cisĂ©ment parce qu'il doit ĂȘtre maintenu tout au long de notre quĂȘte, dans une constante mĂ©fiance non pas vis-Ă -vis du monde, mais de soi-mĂȘme ne rien accepter comme vrai qui ne soit effectivement dĂ©montrĂ©, se mĂ©fier de sa propre opinion comme possiblement infondĂ©e, voilĂ le premier pas indispensable Ă toute recherche de la vĂ©ritĂ©.Quicommence Ă douter semble ne plus pouvoir sâarrĂȘter, et ainsi dĂ©sespĂ©rer de possĂ©der un jour la vĂ©ritĂ©. Selon les sceptiques en effet, nos sens sont peu fiables, et nul nâest assurĂ© que son impression subjective lui permet dâinfĂ©rer une qualitĂ© rĂ©elle de lâobjet. Nos raisonnements eux-mĂȘmes posent problĂšme : tout doit
Dans la Pesanteur et la GrĂące, Simone Weil dĂ©voile son lent cheminement vers Dieu, et donc vers la vĂ©ritĂ©. Pour parvenir Ă ses fins, elle nâa de cesse de se dĂ©pouiller de tout â jusquâau moindre mot superflu dans ses aphorismes. De lâabandon de tout Ă la difficile apprĂ©hension du vide, lâhomme est-il vraiment capable dâaccĂ©der Ă la vĂ©ritĂ© ? Simone Weil En juin 1941, Simone Weil sâinstalle provisoirement chez Gustave Thibon, philosophe catholique français, qui a finalement consenti Ă lâaccepter quelques temps comme travailleuse dans sa ferme. La derniĂšre fois quâelle voit son hĂŽte, en 1942, elle lui remet un bien prĂ©cieux souvenir onze cahiers Ă©crits de sa main. Si jamais Gustave Thibon nâentend plus parler dâelle dans les trois ou quatre annĂ©es Ă venir, il aura la libertĂ© dâutiliser ces textes comme il le souhaite. Câest ainsi quâest nĂ©e cinq annĂ©es plus tard la Pesanteur et la GrĂące. Le caractĂšre posthume de cette publication pourrait a priori nous gĂȘner par certains aspects â choix et ordre des aphorismes laissĂ©s aux soins de Thibon â, en fait il nâen est rien. LâinterprĂ©tation de lâĆuvre de Simone Weil ne laisse ici que peu de doutes. Et ce, quelle que soit la place des aphorismes dans le recueil. Il sâagit lĂ de la marque dâune pensĂ©e simple et cohĂ©rente, comprĂ©hensible sans contexte, ni notes explicatives de lâauteur. Câest le signe dâune rĂ©flexion atemporelle, et mĂȘme, Ă©ternelle. Ces courtes rĂ©flexions font Ă©tat, en toute humilitĂ©, de lâavancĂ©e de Simone Weil dans sa quĂȘte de la vĂ©ritĂ©. Ă leur lecture, on dĂ©couvre que cette recherche de la vĂ©ritĂ© passe par un cheminement exclusivement personnel, propre Ă chacun. La philosophe nous dĂ©blaye cependant dĂ©jĂ une partie de la route, en nous livrant, Ă grands traits, les indications pour trouver le vrai et le bien. Mon Dieu, accordez-moi de devenir rien » La premiĂšre Ă©tape que propose Simone Weil se rĂ©sume en peu de mots le dĂ©tachement de tout. Absolument tout. Il faut dâabord renoncer Ă toute forme de biens matĂ©riels. Ceux-ci doivent ĂȘtre abandonnĂ©s en raison de leur superficialitĂ© et de leur contingence, mais surtout du fait de la dangerositĂ© du lien qui les relie aux biens spirituels. Elle explique en effet quâil faut les concevoir et les sentir comme conditions de biens spirituels exemple la faim, la fatigue, lâhumiliation obscurcissent lâintelligence et gĂȘnent la mĂ©ditation et nĂ©anmoins y renoncer ». Il est intĂ©ressant de constater que, chez Simone Weil, la radicalitĂ© de ses idĂ©es va jusquâĂ mettre en danger lâexistence mĂȘme de sa pensĂ©e. Câest parce quâelle sait que les biens matĂ©riels â qui englobent pour elle les besoins Ă©lĂ©mentaires humains tels que lâalimentation ou le sommeil â peuvent porter atteinte Ă ses facultĂ©s spirituelles quâelle dĂ©cide dây renoncer. Gustave Thibon Cela fait partie de son projet global de renoncer Ă tout ce qui existe. Tout y passe le temps, qui nous pervertit en nous laissant une possibilitĂ© dâimagination et donc un Ă©chappatoire Ă notre malheur, mais aussi lâobjectivation du dĂ©sir, ou encore le je ». Ă propos de ce tout dernier point, elle affirme sans dĂ©tour quâ il nây a absolument aucun autre acte libre qui nous soit permis, sinon la destruction du je ». Il sâagit bien ici dâun suicide philosophique, conçu comme condition pour accĂ©der Ă la vĂ©ritĂ©. LâĂ©tape suprĂȘme, aprĂšs mĂȘme la destruction du je », consistera Ă renoncer aux autres, Ă la vie sociale. Elle lâĂ©nonce ainsi Il ne faut pas ĂȘtre moi, mais il faut encore moins ĂȘtre nous. » Dâune difficultĂ© suprĂȘme â justement parce que lâamour dâautrui ou lâattachement aux autres semble ĂȘtre une forme de renoncement de soi â cette Ă©tape est pourtant indispensable. Simone Weil Ă©crit en effet que la sociĂ©tĂ© est la caverne, la sortie est la solitude ». La lumiĂšre de lâhomme se trouve en dehors de la sociĂ©tĂ©. Il faut donc parvenir Ă sâen extraire pour pouvoir en jouir. Ce dĂ©tachement radical de lâexistence nâa quâun but atteindre le malheur, la solitude, la misĂšre. Autrement dit, le vide. Le vide sâavĂšre ĂȘtre un concept fondamental dans lâĆuvre de Simone Weil, car il est le seul Ă©tat humain qui permette lâaccĂšs Ă la vĂ©ritĂ©. Le vide est ce qui permet Ă Dieu dâaimer lâhomme. Mon Dieu, accordez-moi de devenir rien. Ă mesure que je deviens rien, Dieu sâaime Ă travers moi. » Dieu, la VĂ©ritĂ© et le Bien Une fois le vide installĂ©, il ne reste plus quâĂ attendre Dieu. Ce vide laisse toute la place nĂ©cessaire Ă Dieu pour nous aimer, justement parce que le champ est complĂštement libre et que la moindre parcelle de notre corps et de notre esprit est tournĂ©e vers lui. Or si Dieu parvient Ă nous aimer, il faut en dĂ©duire que nous devons nous aimer Ă©galement Ce nâest pas parce que Dieu nous aime que nous devons lâaimer. Câest parce que Dieu nous aime que nous devons nous aimer. Comment sâaimer soi-mĂȘme sans ce motif ? » Si lâamour de soi qui rĂ©sulte de lâamour de Dieu pourrait paraĂźtre, Ă premiĂšre vue, Ă©trange compte tenu du premier mouvement de destruction du je », il faut bien garder Ă lâesprit que cet amour de soi ne peut intervenir que par le biais de Dieu. Câest comme crĂ©ature aimĂ©e par Dieu que nous pouvons nous aimer. Et pour pouvoir ĂȘtre digne de cet amour, il est nĂ©cessaire dâĂȘtre purifiĂ© de tout, jusquâĂ perdre la seule trace apparente de son existence, le je ». Reste Ă savoir comment dĂ©celer cet amour de Dieu. Comment reconnaĂźtre Dieu ? La philosophe explique tout simplement que le monde en tant que tout Ă fait vide de Dieu est Dieu lui-mĂȘme ». Cela confirme encore une fois que le vide est effectivement nĂ©cessaire Ă la manifestation divine. Câest dans lâabsence de tout, et donc de lui-mĂȘme aussi, que Dieu apparaĂźt. La descente du Saint-Esprit de Titien Quid de la vĂ©ritĂ© dans tout cela ? Pour le comprendre, il faut bien saisir ce que Simone Weil entend par Dieu ». Plus quâun Dieu chrĂ©tien, câest un symbole de la transcendance. Câest lâimage suprĂȘme de ce qui peut transcender lâhomme. Ce Dieu semble finalement faire rĂ©fĂ©rence Ă la vĂ©ritĂ© et au bien absolu, comme seules idĂ©es capables de transcender lâhomme. Que la lumiĂšre Ă©ternelle donne, non pas une raison de vivre et de travailler, mais une plĂ©nitude qui dispense de chercher cette raison » Ă©crit-elle dans lâun de ses derniers aphorismes. La recherche du vrai et du bien serait capable de procurer Ă lâhomme cette plĂ©nitude » quâelle Ă©voque, justement parce que cette quĂȘte ne peut procurer de rĂ©elle raison de vivre et de travailler ». La recherche de la vĂ©ritĂ© et du bien passe par le cheminement intĂ©rieur dĂ©crit en premier lieu, pour arriver au vide et par-lĂ Ă Dieu et Ă lâamour de soi. Telle est la seule plĂ©nitude ». La grĂące seule le peut » Ă quoi pourrait donc ressembler une vie menĂ©e par cette quĂȘte de la transcendance, cette recherche de Dieu ? Elle induit, dĂ©jĂ , la solitude. Lâattachement aux autres nous dĂ©tourne inĂ©vitablement du bien absolu car câest le social qui jette sur le relatif la couleur de lâabsolu ». Or il nây a rien de pire que de confondre bien relatif et bien absolu, puisquâentre les deux il nây a pas une diffĂ©rence de degrĂ©, mais bien de nature. Lâun, le premier, est le contraire du mal, lâautre ne peut se concevoir que par lui-mĂȘme, il est absolu. Il faut absolument chercher la solitude pour pouvoir prendre conscience de ce bien absolu. Autrement dit, nous revenons Ă ce que nous Ă©voquions plus haut la sortie de la caverne passe par la solitude. La quĂȘte de la vĂ©ritĂ© est Ă©galement faite de limite â surtout parce que lâinfini renvoie au plaisir, or tout plaisir est Ă bannir de sa vie. Ainsi, elle prĂŽne une vie mesurĂ©e et limitĂ©e en ces termes [âŠ] Un, le plus petit des nombres. âLe un qui est lâunique sageâ. Câest lui lâinfini. Un nombre qui croĂźt pense quâil sâapproche de lâinfini. Il sâen Ă©loigne. Il faut sâabaisser pour sâĂ©lever. Si 1 est Dieu, â est le Diable. » Se limiter, câest prendre conscience de la finitude des choses et par-lĂ , de nous-mĂȘmes. Cela nous aide Ă©galement Ă concevoir la mort plus sereinement puisque, par certains aspects, nous sommes Ă lâorigine de notre mort. La limite, câest le contrĂŽle de tout. Finalement, câest au plus simple quâil faut rĂ©duire sa vie. Dâune façon extrĂȘme â jusquâau vide. Et câest bien lĂ toute la difficultĂ©. Il faut accĂ©der au vide, et cependant le supporter, sây engouffrer. Ne pas exercer tout le pouvoir dont on dispose, câest supporter le vide. Cela est contraire Ă toutes les lois de la nature la grĂące seule le peut. »
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