Aufil du temps, les armoiries et chevalier de la devise a commencé à mettre non seulement à bord, mais aussi sur le casque. Il était une marque spéciale de distinction, un analogue moderne de carte d'identité ou une carte de visite.

Par exemple, Pour ceux qui ne connaissent pas l'emission du bachelor, c'Ă©tait un gars qui devait choisir entre plusieur fille, celle avec laquelle il voulait faire sa vie. Pourquoi la bonne Ă©poque ? Parce que Ă  cette Ă©poque l'homme n'Ă©tait pas le soumis de la femme. C'Ă©tait les femmes qui se battaient entre elles pour avoir le mal alpha et pas l'inverse. ça me rappel le moyenne age, ou les jeunes filles de la cour ce battaient entre elles pour s’arracher le chevalier, en mode mal alpha avec son Ă©pĂ©e Ă  sa ceinture Maintenant les hommes sont soumis, y'a qu'Ă  voir toute les Ă©missions pro fĂ©ministe, comme le truc avec les gars moches et les beaux qui se violent pour une fille de merde. Maintenant si t’accoste pas dans la rue une fille, ou si tu n'en connais pas dans un cercle d'amis, eh bien tu seras seul toute ta vie... Si t'as pas les couilles d’accoster eh bah osef de toi, tu seras seul, parce que t'es pas soumis aux femmes. adopte un mec le site qui fait passer les mecs pour des objets le pire c'est que ça marche du tonnerre, vu tout les petits soumis qui s'y inscrivent... T'aurais fais adopte une meuf, lĂ  direct boum assos fĂ©ministe dans ta gueule, 10 000 euros d'amande pour discrimination... Encore une autre preuve, une fille crie dans la rue "qui veut baiser avec moi" t'as une meute de mec soumis qui va se rabouler. L'inverse ? Un mec va faire ça, personne va venir, et tout le monde va te traiter de sale pervers de merde. Et puis ça empire avec le temps... Le mĂ©nage, non non les princesses ne veulent plus le faire, c'est aux soumis de merde d'hommes de le faire... la vaisselles ect... Et le pire, c'est les statistiques trĂšs inquiĂštant qui dĂ©clare que les filles trompent largement plus les hommes que l'inverse. Je suis tombĂ© sur ce sondage trĂšs explicite sur la question 58 % des femmes se disent trĂšs amoureuses de leur partenaire contre 92 % des hommes vis-Ă -vis de leur compagne." Et puis tout mes exemples s'applique de mĂȘme pour la vie virtuelle, regardĂ© ce forum, dĂ©s qu'une conne va crĂ©er un topic, il va devenir rouge les 3secondes qui suivent sa crĂ©ation... c'est pas une autre preuve flagrante de la soumission des hommes aux femmes ? ... Il faut remettre les idĂ©es et les rĂŽles en place... Une femme ne doit pas se prendre pour une conasse de princesse. DerriĂšre le fourreau, tu bosses, tu me fais mes mĂŽmes et tu ne rĂ©ponds pas sous risque de prendre une grosse tarte dans ta gueule. ILS SONT OU LES HOMMES HEIN ? OU ? MOI JE NE VOIS QUE DES FEMMELETTES ! Source pour les pourcentages . PS dĂ©dicace Ă  Le_Noble

Sijamais vous aviez le temps de prendre la parole et de devenir un homme pour votre femme, aujourd’hui, c’est l’époque. RĂ©cemment, une publicitĂ© a capturĂ© le meilleur de la chevalerie moderne, la campagne «Bande Acche Hai» de ICICI Prudential. Tant de gens ont Ă©tĂ© touchĂ©s par cette annonce; Je me souviens que mes parents ont acquiescĂ© et que je deviens

RĂ©sumĂ© Plan Texte Notes Citation Auteur RĂ©sumĂ© Les super-hĂ©ros ont envahi la plupart des mĂ©dias de masse. D’abord apparus dans les bandes dessinĂ©es, plus prĂ©cisĂ©ment dans les comics amĂ©ricains Ă  partir des annĂ©es 1930, puis adaptĂ©s dans des feuilletons radiophoniques, ils ont ensuite gagnĂ© le septiĂšme art ainsi que le petit Ă©cran, sous forme de films, de dessins animĂ©s et de sĂ©ries tĂ©lĂ©visĂ©es. Aujourd’hui, ils sont Ă©galement prĂ©sents dans les jeux vidĂ©o et font l’objet de nombreux produits dĂ©rivĂ©s jouets, figurines ou encore vĂȘtements ; enfin, leur image est prĂ©sente sur des publicitĂ©s et des emballages de article se propose d’analyser les modes d’émergence et les causes de succĂšs de ces figures fantastiques aux pouvoirs ou aux appareillages extraordinaires, qui fascinent les adultes autant que les enfants et tiennent lieu de nouveaux mythes, au sein d’une sociĂ©tĂ© que l’on a pourtant voulu croire dĂ©senchantĂ©e, enfermĂ©e dans la cage d’acier » du rationalisme – selon l’expression de Max Weber – et dĂ©finitivement rĂ©fractaire aux appels du de page Texte intĂ©gral De la mort de Dieu Ă  la naissance du super-hĂ©ros, des demi-dieux en quĂȘte de sens 1Si l’on veut vraiment comprendre l’engouement que les super-hĂ©ros suscitent depuis prĂšs d’un siĂšcle, il convient d’interroger les formes parti­culiĂšres Ă  travers lesquelles ils se dĂ©ploient ainsi que les fonctions symboliques qu’ils assurent auprĂšs de l’homme moderne, mais surtout le contexte historique global au sein duquel se sont dĂ©veloppĂ©s ces personnages fantastiques. Ainsi, si les annĂ©es 1930 marquent leur naissance officielle au sein des maisons d’édition DC Comics et Marvel Comics, il nous semble utile de remonter plus avant dans le temps pour saisir pleinement les facteurs qui ont pu favoriser leur crĂ©ation. 2La fin du XIXe siĂšcle, notamment, prĂ©sente des bouleversements socioculturels qui ne sont peut-ĂȘtre pas Ă©trangers Ă  l’apparition ultĂ©rieure de ces crĂ©atures hors du commun. Cette pĂ©riode se caractĂ©risa par l’accĂ©lĂ©ration de la rĂ©volution industrielle et une multiplication des progrĂšs techniques, par l’essor du positivisme, d’un point de vue scientifique, et de l’individualisme, d’un point de vue social. Elle marqua aussi la diffu­sion d’un rationalisme outrancier que le siĂšcle des LumiĂšres avait dĂ©jĂ  commencĂ© Ă  instiller, la croissance de l’athĂ©isme et l’affaiblissement conjoint des grandes idĂ©ologies transcendantes, pourvoyeuses de sens. 3Or dans ce dĂ©senchantement du monde » que dĂ©nonçait le sociologue Max Weber, les hĂ©ros d’antan ne semblaient plus trouver leur place. La littĂ©rature s’est d’ailleurs fait l’écho de tels chan­gements aprĂšs avoir prĂ©figurĂ©, dĂšs les romans de TolstoĂŻ et de Stendhal, la mise Ă  mal des actes hĂ©roĂŻques et surtout la disparition de cette belle mort » que peignaient les Ă©popĂ©es grĂ©co-romaines puis les chansons de geste mĂ©diĂ©vales Ă  propos des premiĂšres armes Ă  feu comme l’arquebuse, l’Arioste dĂ©clarait dĂ©jĂ  dans Roland furieux 1 Jean Kaempfer, PoĂ©tique du rĂ©cit de guerre, Paris, JosĂ© Corti, 1998. 4 Comment as-tu pu trouver place dans un cƓur humain, cruelle et brutale invention ? Avec toi plus de gloire militaire, avec toi le mĂ©tier des armes perd son honneur, car tu rends inutiles la force et la valeur. Le lĂąche devient avec toi bien souvent vainqueur de l’homme le plus courageux. La bravoure, l’intrĂ©piditĂ© n’ont plus le moyen de se faire distinguer dans les combats », aprĂšs avoir critiquĂ© les combats impersonnels de la guerre industrielle, laquelle prive le soldat de sa capacitĂ© Ă  se distinguer par des exploits indivi­duels et l’empĂȘche de connaĂźtre la gloire1, elle est allĂ©e jusqu’à crĂ©er des anti-hĂ©ros, dont Ferdinand Bardamu, le personnage de CĂ©line dans Voyage au bout de la nuit, est l’une des illustrations. 2 Jean Kaempfer, PoĂ©tique du rĂ©cit de guerre, Paris, JosĂ© Corti, 1998. 5Pourtant cet anti-hĂ©roĂŻsme qui trouverait l’une de ses origines, selon Jean Kaempfer2, dans les massacres de masse rendus possibles par les avancĂ©es technologiques, et dans le doute intel­lectuel et spirituel qui a progressivement gagnĂ© les consciences Ă  l’aube des temps modernes, a rapidement enfantĂ© son contraire Ă  travers le genre fantastique le super-hĂ©roĂŻsme. Ne faut-il pas y voir une incapacitĂ© de l’ĂȘtre humain – qui, Ă  l’instar de la nature, a horreur du vide – Ă  vivre dans un monde sans idoles et Ă  se satisfaire des choses profanes ? 6Les Ă©crits de Friedrich Nietzsche nous permet­tent d’apprĂ©hender comment, dans un monde dĂ©sertĂ© par les idĂ©aux mĂ©taphysiques, marquĂ© par la mort de Dieu » et le nihilisme, l’homme moderne a pu ressentir le besoin de dĂ©passer une profonde crise morale et tĂ©lĂ©ologique en crĂ©ant de nouvelles formes de divin, plus anthropocentrĂ©es, capables de redonner du sens Ă  son existence. Ce passage du Gai savoir nous paraĂźt significatif 7 Dieu est mort ! Dieu reste mort ! Et c’est nous qui l’avons tuĂ© ! Comment nous consoler, nous les meurtriers des meurtriers ? Ce que le monde a possĂ©dĂ© jusqu’à prĂ©sent de plus sacrĂ© et de plus puissant a perdu son sang sous notre couteau. – Qui nous lavera de ce sang ? Avec quelle eau pourrions-nous nous purifier ? Quelles expiations, quels jeux sacrĂ©s serons-nous forcĂ©s d’inventer ? La grandeur de cet acte n’est-elle pas trop grande pour nous ? Ne sommes-nous pas forcĂ©s de devenir nous-mĂȘmes des dieux simplement – ne fĂ»t-ce que pour paraĂźtre dignes d’eux ? ». 3 Les deux premiĂšres adaptations cinĂ©matographiques de Spiderman, effectuĂ©es par Sam Raimi en 2002 et ... 8De fait, bon nombre de super-hĂ©ros sont animĂ©s par une sorte d’hybris. Si tous ne prĂ©tendent pas, comme l’omniscient et omnipotent Dr Manhattan de Watchmen, Ă©galer Dieu cette prĂ©tention est plutĂŽt attribuĂ©e aux super-vilains » que combattent les super-hĂ©ros3, ils n’en ont pas moins la volontĂ© de se substituer Ă  lui lorsque la sociĂ©tĂ© humaine se rĂ©vĂšle impuissante Ă  mettre hors d’état de nuire les crĂ©atures malĂ©fiques qui la menacent et qu’il s’agit de rendre une justice supĂ©rieure ou de la derniĂšre chance Batman, par exemple, s’est donnĂ© pour mission de combattre le crime qui sĂ©vit dans la ville de Gotham City, tout comme Spiderman, qui s’efforce d’assainir les rues de la ville de New York. 4 Les super-hĂ©ros reprennent Ă  leur compte d’autres caractĂ©ristiques jadis attachĂ©es Ă  des demi-dieux ... 9Les super-hĂ©ros endossent ainsi une fonction mĂ©diatrice, Ă  l’instar des demi-dieux de la mytho­logie grĂ©co-romaine4. Ils assurent une mĂ©diation entre l’ordinaire et l’extraordinaire, instaurent des liens entre l’humain et le divin et mĂȘme parfois l’animal, ainsi que nous le prĂ©ciserons ultĂ©rieurement, bref se prĂ©sentent comme des transcendances immanentes. D’ailleurs, Ă  l’ex­ception de quelques-uns d’entre eux, comme les 4 fantastiques ou X-Men, la plupart ne conservent pas l’état de super-hĂ©ros en permanence. Ils ex­priment une bipolaritĂ© qui les fait alterner entre un Ă©tat de normalitĂ© et un Ă©tat de sur-normalitĂ© ; ils sont des hommes ordinaires capables de se transformer en crĂ©atures aux pouvoirs extraordi­naires. C’est la raison pour laquelle le processus de mĂ©tamorphose et l’activitĂ© de dĂ©guisement sont si importants chez nombre de super-hĂ©ros. DerriĂšre une conception manichĂ©enne du monde, un brouillage des repĂšres et une crise identitaire 10En outre, par rapport Ă  une perte de repĂšres gé­nĂ©ralisĂ©e notamment la dissolution des valeurs morales, susceptible d’engendrer un sentiment de dĂ©rĂ©liction, les super-hĂ©ros semblent redessi­ner les contours d’un univers manichĂ©en, facile Ă  apprĂ©hender, puisque les bons » affrontent les mĂ©chants » et triomphent d’eux la plupart du temps. Parmi les X-Men, par exemple, les gentils mutants rĂ©unis autour du professeur Charles Xavier, qui tentent de vivre en harmonie avec les humains, s’opposent aux mutants qui se sont Ă©garĂ©s sur la voie du mal et qui, rassemblĂ©s autour de MagnĂ©to, espĂšrent la disparition de l’humanitĂ©. Les super-hĂ©ros ont donc quelque chose de rassurant en ce qu’ils rĂ©introduisent apparemment des frontiĂšres perceptibles et des valeurs structurantes. Pas de Superman sans Lex Luthor, pas de Batman sans Joker. 5 À noter que Batman fut créé en 1939. 6 L’insĂ©curitĂ© urbaine est Ă©galement prĂ©sente dans la ville de New York, oĂč Ă©volue Peter Parker, alia ... 11LĂ  encore, on peut raisonnablement penser que le terreau socioculturel dans lequel se dĂ©veloppÚ­rent les super-hĂ©ros a quelque chose Ă  voir avec cette obsession justiciĂšre voire sotĂ©riologique. En effet, les annĂ©es 1930 sont les annĂ©es de la Grande DĂ©pression, aux États-Unis, qui font suite au krach boursier de Wall Street. Ce sont aussi les annĂ©es contemporaines de la prohibition et de l’ñge d’or du crime organisĂ©, dont Al Capone fut le symbole. Les rues malfamĂ©es de Gotham City, la ville de Batman5, ressemble d’ailleurs Ă  Chicago6. Captain America exprime plus explicitement encore le lien entre l’histoire Ă©tasunienne, cahoteuse voire chaotique, du dĂ©but du XXe siĂšcle, et la naissance des super-hĂ©ros, puisque le personnage Steve Rogers est nĂ© en 1917 et a grandi dans le quartier dĂ©favorisĂ© du Lower East Side – Ă  l’instar de son crĂ©ateur Jack Kirby – aux cĂŽtĂ©s d’un pĂšre alcoolique. 7 Il en va de mĂȘme chez certains personnages qui gravitent autour des super-hĂ©ros. Wonder Woman, par ... 12Cependant, pour manichĂ©en que puisse paraĂźtre l’univers des super-hĂ©ros, un niveau d’analyse plus approfondi laisse entrevoir l’ambivalence du monde et des personnages hors normes qui l’habitent. Ainsi les super-hĂ©ros qui luttent contre le mal peuvent-ils eux-mĂȘmes avoir un cĂŽtĂ© sombre Batman est un chevalier noir Dark Knight, l’honorable procureur Harvey Dent devient finalement l’abominable Double Face, et la police de Gotham City, censĂ©e protĂ©ger les citoyens de la ville, est largement corrompue ; Spiderman, dans le troisiĂšme volet cinĂ©matogra­phique de Sam Raimi, rĂ©vĂšle un aspect obscur de sa personnalitĂ© ; Wolverine est un mutant qui se bat pour une bonne cause mais qui est violent et enfreint l’interdiction de Cyclope, relative au fait de ne pas tuer, etc. Inversement, les figures reprĂ©sentatives du mal se convertissent parfois Catwoman fut longtemps une cambrioleuse et une ennemie acharnĂ©e de Batman, avant de devenir une justiciĂšre masquĂ©e7. 8 Le super-hĂ©ros, en effet, affirme son libre-arbitre par rapport Ă  des situations qu’il n’a pas voul ... 13Contrairement Ă  ce que l’on pourrait croire au premier abord, loin d’ĂȘtre figĂ©es, les frontiĂšres qui jalonnent l’univers des super-hĂ©ros sont donc mouvantes et les forces en prĂ©sence qui s’affron­tent sont rĂ©versibles. Pour utiliser la terminologie du courant existentialiste apparu vers la mĂȘme Ă©poque, aucune essence prĂ©dĂ©terminĂ©e et immuable ne dĂ©termine l’existence. La libertĂ© de ces crĂ©atures extraordinaires est souvent mise en avant, et les choix qu’elles effectuent permettent de modifier le cours des Ă©vĂ©nements8. 14Les super-hĂ©ros sont donc les reflets d’une Ăšre incertaine, oĂč se trouvent quelque peu brouillĂ©es les anciennes bornes de dĂ©marcation – comme annoncĂ© par Nietzsche dans Par-delĂ  bien et mal – et oĂč se nouent des crises d’identitĂ© multidimen­sionnelles crise des identitĂ©s individuelles, crise des identitĂ©s culturelles et sociales, crises des valeurs enfin, elles-mĂȘmes fondatrices des identitĂ©s morales. Les personnages de X-Men symbolisent bien cette crise identitaire. N’étant plus tout Ă  fait des hommes mais n’ayant pas encore rĂ©ussi Ă  intĂ©grer une surhumanitĂ© stabilisĂ©e, capable de contrĂŽler leurs pouvoirs, de s’accepter et de vivre sereinement avec leur environnement, les mutants sont dans une sorte d’état transitoire, liminal, tant sur un plan biologique que psychologique. Hulk, lui aussi, personnage qui Ă©voque Ă  bien des Ă©gards les bipolaires Dr ekyll et Mr Hyde de Robert Louis Stevenson, ou encore Harvey Dent, le schizophrĂšne Double Face de Gotham City, illustrent cette crise iden­titaire, puisque les pĂ©ripĂ©ties qu’ils connaissent sont dues Ă  leur double personnalitĂ©. 9 Dans le film Catwoman rĂ©alisĂ© par Pitof en 2003, la super-hĂ©roĂŻne n’est plus, comme c’était le cas ... 15On notera d’ailleurs que la pseudo-divinitĂ© des super-hĂ©ros caractĂ©risĂ©e notamment par la toute-puissance, l’ubiquitĂ©, la tĂ©lĂ©pathie, la tĂ©lĂ©porta­tion, l’omniscience, etc. se combine trĂšs souvent, assez paradoxalement, avec des comportements instinctifs et des pulsions animales, soit que ce mĂ©lange traduise une hybridation rĂ©elle, soit qu’il manifeste une projection imaginaire. Spiderman est l’homme-araignĂ©e, Hulk voit rĂ©guliĂšrement se rĂ©veiller la bĂȘte qui sommeille en lui, Batman s’identifie Ă  une chauve-souris et Catwoman Ă  une chatte9, Wolverine dont le nom est dĂ©rivĂ© de l’anglais wolf, Ă©voque le mythe du loup-garou, par son aspect velu et ses griffes
 Autre preuve de cette crise identitaire, la majoritĂ© des super-hĂ©ros possĂšdent une double identitĂ©, Ă  savoir une identitĂ© civile, qui les apparente Ă  des personnes normales », et une identitĂ© secrĂšte, qui les lie au monde des super-hĂ©ros Peter Parker / Spiderman, Bruce Wayne / Batman, Clark Kent / Superman, Bruce Banner / Hulk, SĂ©lina Kyle et Holly Robinson / Catwoman, Diana Prince / Wonder Woman, etc. L’ambivalence des progrĂšs scientifiques et techniques, causes de dĂ©sordre et sources de rĂ©-enchantement 10 LoĂŻc Gresh et Robert Weinberg, Les Super-hĂ©ros et la science, Paris, Flammarion, 2004. 16L’ambivalence n’est pas seulement relative Ă  l’identitĂ© des super-hĂ©ros et aux rapports que ces derniers entretiennent avec les valeurs morales. Elle s’exprime Ă©galement Ă  travers les progrĂšs de la science et de la technique, qui constituent une thĂ©matique quasi rĂ©currente10 et apparaissent profondĂ©ment janusiennes, tantĂŽt source du mal, tantĂŽt remĂšde contre ce mĂȘme mal, Ă  l’instar d’un poison thĂ©riaque. D’une part, le dĂ©veloppement scientifique et technique apparaĂźt comme une cause d’entropie, et par consĂ©quent de dĂ©gĂ©né­rescence les mutants d’X-Men, par exemple, sont poursuivis par des robots chasseurs baptisĂ©s Sentinelles ; quant Ă  la personnalitĂ© monstrueuse d’Hulk, elle est due Ă  une expĂ©rience scientifique qui a mal tournĂ©, tout comme celle du Dr Octopus ou encore celle du Bouffon vert, incarnation de cette science sans conscience que redoutait dĂ©jĂ  Rabelais au tout dĂ©but des temps modernes. 17Les problĂ©matiques eschatologiques sont d’ailleurs souvent prĂ©gnantes dans les aventures des super-hĂ©ros, les risques de destruction de l’humanitĂ© Ă©tant liĂ©s Ă  des dĂ©couvertes non maß­trisĂ©es ou non dotĂ©es d’une Ă©thique. Il ne faut guĂšre oublier que bon nombre de personnages et de numĂ©ros de comics ont vu le jour aprĂšs les massacres traumatisants de la Seconde Guerre mondiale, mais aussi aprĂšs les bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki la pĂ©riode dite de l’ñge d’or des comics », en effet, s’étale des annĂ©es 1930 jusqu’au milieu des annĂ©es 1950. Le cours de l’histoire humaine se retrouve ainsi chez Captain America, super-hĂ©ros créé au dĂ©but des annĂ©es 1940 par Joe Simon et Jack Kirby, et qui combat le nazisme, de mĂȘme que chez Wonder Woman, dont les aventures commen­cent Ă  la mĂȘme Ă©poque. La peur de l’énergie atomique se lit aussi dans la sĂ©rie de comics book Watchmen, qui Ă©voque clairement la terreur relative aux accidents nuclĂ©aires, Ă  travers le Dr Manhattan – dont le nom n’est pas sans rappeler le Projet Manhattan, qui aboutit au bombardement du Japon. Hulk, quant Ă  lui, a vu le jour suite Ă  l’explosion d’une bombe Ă  rayons gamma lors d’essais militaires, et Steve Rogers est transformĂ© en Captain America grĂące Ă  un sĂ©rum combinĂ© Ă  une expĂ©rience d’irradiation. 18Mais d’autre part, les avancĂ©es de la science permettent aux super-hĂ©ros de lutter contre les ĂȘtres malfaisants Captain America et bien d’autres leur doivent leurs pouvoirs extraordi­naires ou leur arsenal guerrier. Certains se servent de la technique comme d’un adjuvant externe capable de soutenir et de dĂ©cupler leur action Batman, Iron man
, d’autres ont directement assimilĂ© et incorporĂ© celles-ci, gĂ©nĂ©tiquement ou Ă  la façon d’une orthĂšse voire d’une prothĂšse tel est le cas pour Hulk, les 4 fantastiques, Steve Austin dans L’homme qui valait trois milliards, Super Jamie, la femme bionique
, dĂ©passant ainsi l’opposition homme/machine. En mĂȘme temps qu’elles mettent en garde contre des inventions dĂ©bridĂ©es, les aventures des super-hĂ©ros semblent faire passer le message qu’uti­lisĂ©es Ă  bon escient, ces innovations peuvent sauver le monde. Et les super-hĂ©ros renouent ainsi avec le mythe du sauveur » que Raoul Girardet a identifiĂ© dans Mythes et mythologies politiques. 11 Le sacrĂ© sauvage, Paris, Payot, 1975 La mythologie moderne », pp. 85-90. 19Ni tout Ă  fait technophobes, ni tout Ă  fait techno­philes, ces histoires disent un monde qui ne peut plus ĂȘtre pensĂ© en dehors du progrĂšs technique. Mais il y a plus alors que le progrĂšs technique fut longtemps considĂ©rĂ© comme dĂ©sacralisant, privant le combattant de tout comportement hĂ©roĂŻque, comme nous l’avons vu avec l’Arioste, celui-ci apparaĂźt dĂ©sormais comme la pierre de touche mĂȘme du super-hĂ©roĂŻsme le Super-Soldat Captain America est ainsi un modĂšle exem­plaire de bravoure et d’hĂ©roĂŻsme pour tous ses camarades combattants et des nouvelles formes symboliques que ces derniers engendrent. De nouveaux mythes, non plus intemporels ou ger­mant dans un passĂ© originel, mais pris dans le flux tourmentĂ© de l’Histoire, sont en train d’éclore sur le terreau mĂȘme de la technique, comme l’a bien relevĂ© Roger Bastide11, et ces nouveaux mythes que sont les super-hĂ©ros renforcent et alimen­tent Ă  leur tour le mythe moderne du ProgrĂšs, tout en continuant de vĂ©hiculer des messages archĂ©typiques. 12 François Jost, Le culte du banal. De Duchamp Ă  la tĂ©lĂ©-rĂ©alitĂ©, Paris, CNRS Ă©ditions, 2007. 20À travers les super-hĂ©ros, la techno-science peut donc, contre toute attente, rĂ©-enchanter le monde – au sens oĂč l’entend Michel Maffesoli –, rĂ©concilier les productions de la raison et celles de l’imagination. Au lieu de concevoir le systĂšme de la techne comme incompatible avec les structures symboliques, ainsi que le pensent Jacques Ellul et les membres de l’école de Francfort, l’univers du super-hĂ©roĂŻsme les combine. En ce sens, il se pose en rupture avec un mouvement tendanciel qui, parallĂšlement, forge un culte du banal12 » au sein de la sociĂ©tĂ© occidentale, tant Ă  travers l’art avec des Ɠuvres comme celles de Marcel Duchamp ou des dadaĂŻstes qu’à travers la tĂ©lé­vision avec des Ă©missions de tĂ©lĂ©-rĂ©alitĂ© comme Loft story. De fait, les super-hĂ©ros possĂšdent une importante fonction onirique. 21Mais Ă  la diffĂ©rence de personnages comme Harry Potter, par exemple, ou de ceux que l’on croise dans Le Seigneur des anneaux et le Da Vinci Code, lesquels font rĂȘver les lecteurs, les cinĂ©philes ou les tĂ©lĂ©spectateurs en sollicitant uniquement les ressorts anciens qui animaient les traditions Ă©sotĂ©riques, la magie et les contes, en faisant intervenir le merveilleux et le surnaturel, la plupart des super-hĂ©ros intĂšgrent les paramĂštres de la modernitĂ© afin de construire un fantastique enchanteur. Wonder Woman est peut-ĂȘtre la super-hĂ©roĂŻne qui exprime le mieux le dĂ©sir de conciliation des mythes traditionnels et de la technique, puisque cette princesse amazone aux pouvoirs surnaturels ne se contente pas d’utiliser les cadeaux que lui ont offerts les dieux grecs de l’Olympe elle possĂšde un avion invisible et n’hĂ©site pas Ă  tirer Ă  la mitraillette, abandonnant son lasso magique et son diadĂšme boomerang, pour venir Ă  bout de ses ennemis. De l’image virtuelle Ă  la vie concrĂšte les super-hĂ©ros comme modĂšles d’action mythiques 13 Le sacrifice du latin sacra » et facere », soit l’accomplissement de choses sacrĂ©es »,, ne ... 14 Abraham Moles, La Fonction des mythes dyna­miques dans la construction de l’imaginaire social », ... 15 La Politique symbolique, Paris, PUF, Quadrige, 1993, p. 277 et suivantes, p. 303. 22Les super-hĂ©ros renouent donc avec le sacrĂ© – mĂȘme s’il s’agit d’un sacrĂ© sĂ©cularisĂ© – et l’acte sacrificiel13 du hĂ©ros antique, sans toutefois renoncer aux acquis de la modernitĂ©. Ils rentrent ainsi dans la catĂ©gorie des mythes dynamiques » tels que les dĂ©crit Abraham Moles14, mythes qui favorisent les progrĂšs technico-scientifiques et constituent des moteurs sociaux » en incitant Ă  l’action, ce dont Icare apparaĂźt comme l’une des expressions originelles les plus significatives. Malade de son histoire », ainsi que le note Lucien Sfez, la sociĂ©tĂ© contemporaine semble Ă  nouveau puiser dans la mĂ©moire du passĂ©, la mĂ©moire doxique, afin de se guĂ©rir, trouvant dans le pharmacon » des images symboliques un remĂšde Ă  la reprĂ©sentation en » Peut-ĂȘtre est-ce lĂ  un moyen d’échapper au totalita­risme technologique » et au tautisme » ? 16 L’univers d’X-Men possĂšde Ă©galement des person­nages aux noms Ă©vocateurs, tels Cyclope et PhĂ©nix. 17 Alex Nikolavitch, Mythe & Super hĂ©ros, Paris, Les Moutons Ă©lectriques, 2011. 23Certains rĂ©actualisent des mythes anciens Batman et Iron man, chevaliers en armures, Wolverine loup-garou16, Wonder Woman ama­zone aimĂ©e des dieux de l’Olympe
, d’autres crĂ©ent de nouveaux univers mythiques tout en s’inspirant souvent du passĂ©, Ă  l’instar de Superman, sorte d’Icare des temps modernes qui, comme Achille, possĂšde son point de vulnĂ©rabilitĂ© avec la kryptonite. Enfin, ils sont devenus eux-mĂȘmes de vĂ©ritables mythes17 pour de nombreuses gĂ©nĂ©rations, des icones Ă  la fois sacrĂ©es et populaires. Et comme les hĂ©ros mythiques d’antan, les super-hĂ©ros reprĂ©sentent des guides de conduite, de vĂ©ritables modĂšles identificatoires ainsi que des figures compensatoires susceptibles de contrer le processus de dĂ©senchantement amorcĂ© vers la fin du XIXe siĂšcle. Le phĂ©nomĂšne de com­pensation est d’ailleurs inhĂ©rent au mythe, si l’on en croit Roger Caillois, affirmant dans Le Mythe et l’homme que le hĂ©ros mythique reprĂ©sente pour l’individu une image idĂ©ale de compensation qui colore de grandeur son Ăąme humiliĂ©e », et que grĂące Ă  la fonction fabulatrice des mythes, les instincts peuvent prendre les satisfactions que la rĂ©alitĂ© leur refuse ». L’homme procĂšderait ainsi Ă  une identification virtuelle au hĂ©ros » et obtiendrait une gratification idĂ©ale, Ă©tant entendu que la grandeur est certainement la finalitĂ© du mythe ». Or cette image de grandeur, les super-hĂ©ros l’incarnent Ă  double titre, Ă©tant investis d’une puissance physique ou sensorielle exceptionnelle, et d’une grandeur morale pour bon nombre d’entre eux, qui en font les garants de l’ordre social voire cosmique. Car, toujours selon Roger Caillois, le mythe est un exemple concret de la conduite Ă  tenir ». Un point de vue que partage Mircea Eliade, lequel remarque dans Aspects du mythe que ce dernier est vivant, en ce sens qu’il fournit des modĂšles pour la conduite humaine et confĂšre par lĂ  mĂȘme signification et valeur Ă  l’existence ». 18 François Jost, SĂ©ries policiĂšres et stratĂ©gies de programmation », in Pierre Beylot et GeneviĂšve ... 24On peut qualifier le mimĂ©tisme auquel invitent les super-hĂ©ros de mode mimĂ©tique haut », si l’on reprend la typologie Ă©laborĂ©e par François Jost Ă  partir de la classification des fictions de Northop Frye. François Jost le dĂ©finit comme un mode qui propose des hĂ©ros supĂ©rieurs en degrĂ© aux autres hommes », par opposition au mode mimĂ©tique bas », qui met en scĂšne des personnages qui sont Ă  la fois Ă©gaux Ă  leur environnement et Ă  l’ĂȘtre » 19 20 Super-hĂ©ros pour de vrai », diffusĂ© sur TF1 le 7 janvier 2011. 1 25Preuve de cette identification de certains lecteurs ou tĂ©lĂ©spectateurs aux super-hĂ©ros, aux États-Unis, au Canada et mĂȘme en Grande-Bretagne, des justiciers masquĂ©s endossent rĂ©guliĂšrement le costume de leur super-hĂ©ros favori pour faire rĂ©gner l’ordre ou secourir les plus dĂ©munis, ainsi que l’ont rĂ©vĂ©lĂ© de rĂ©cents articles de presse New York Daily News du 9 octobre 2008, The Independent du 4 avril 2010, des journaux tĂ©lé­visĂ©s Ă©trangers19 et documentaires français20, un phĂ©nomĂšne que dĂ©crit Ă©galement le film de Matthew Vaughn, Kick-Ass, sorti sur les Ă©crans en 2010. Un site internet recense mĂȘme ces citoyens modĂšles qui se prennent pour Batman, Superman ou Cat woman21, et qui traquent les criminels en faisant concurrence Ă  la police
 22 Victor Scardigli, Entre science et magie, deux pensĂ©es du monde », in Sylvie Craipeau, GĂ©rard Dub ... 23 Philippe Guedj, Comics dans la peau des super- hĂ©ros, Paris, TimĂ©e-Éditions, 2006. 24 Jean-Marc LainĂ©, Super-hĂ©ros ! La puissance des masques, Paris, Les Moutons Ă©lectriques, 2011. 26Le paradoxe d’une sociĂ©tĂ© apparemment dĂ©sacra­lisĂ©e qui serait simultanĂ©ment rĂ©investie par des mythes aux contours renouvelĂ©s et protĂ©iformes, ces mythologies modernes que Roland Barthes et Roger Bastide s’efforçaient de traquer dans les moindres recoins de notre culture, n’est donc qu’apparent, si l’on prend en compte le fait que le tout-technique » actuel et la logique d’inno­vation permanente qui lui est inhĂ©rente, porteuse de changement et d’instabilitĂ©, tendent Ă  rĂ©activer les pratiques magiques et la pensĂ©e symbolique22. Les manifestations du logos ne semblent guĂšre parvenir Ă  Ă©vincer durablement les expressions du muthos, et s’engagent parfois mĂȘme, avec elles, dans des mariages de raison, voire de pas­sion, ainsi qu’en tĂ©moignent les super-hĂ©ros, ces crĂ©atures fictives qui tout Ă  la fois transcendent la banalitĂ© de notre quotidien, et reflĂštent notre sociĂ©tĂ©23, avec ses dĂ©rives24 mais aussi ses idĂ©aux de libertĂ©, de vĂ©ritĂ© et de justice. Haut de page Notes 1 Jean Kaempfer, PoĂ©tique du rĂ©cit de guerre, Paris, JosĂ© Corti, 1998. 2 Jean Kaempfer, PoĂ©tique du rĂ©cit de guerre, Paris, JosĂ© Corti, 1998. 3 Les deux premiĂšres adaptations cinĂ©matographiques de Spiderman, effectuĂ©es par Sam Raimi en 2002 et 2004, mettent bien en Ă©vidence cette caractĂ©ristique du Bouffon vert et du Docteur Octopus Ă  se prendre pour Dieu. 4 Les super-hĂ©ros reprennent Ă  leur compte d’autres caractĂ©ristiques jadis attachĂ©es Ă  des demi-dieux ou Ă  des hĂ©ros mythiques traditionnels. Umberto Eco a ainsi montrĂ©, dans de Superman au Surhomme, qu’ils semblent Ă©voluer hors du temps, ĂȘtre investis d’une jeunesse Ă©ternelle, etc. Et lorsque leurs crĂ©ateurs les font mourir dans quelque numĂ©ro de comics, il n’est pas rare qu’ils les fassent ressusciter dans un autre numĂ©ro
 5 À noter que Batman fut créé en 1939. 6 L’insĂ©curitĂ© urbaine est Ă©galement prĂ©sente dans la ville de New York, oĂč Ă©volue Peter Parker, alias Spiderman, qui a d’ailleurs vu son oncle se faire tuer sous ses yeux par un voleur. 7 Il en va de mĂȘme chez certains personnages qui gravitent autour des super-hĂ©ros. Wonder Woman, par exemple, ne se contente pas d’arrĂȘter des criminels, elle ambitionne de les faire changer sur une petite Ăźle baptisĂ©e Transformation Island, prĂšs de Paradise Island, sur laquelle se trouve un centre de rĂ©habili­tation. 8 Le super-hĂ©ros, en effet, affirme son libre-arbitre par rapport Ă  des situations qu’il n’a pas voulues et que parfois mĂȘme il n’a pas choisies. Ainsi, si l’état de super-hĂ©ros est souvent le fruit du hasard, d’acci­dents scientifiques et nuclĂ©aires Hulk, Watchmen
, ou de mutations gĂ©nĂ©tiques incontrĂŽlĂ©es X-Men, il n’en sollicite pas moins l’engagement et le sens des responsabilitĂ©s chez ces victimes. 9 Dans le film Catwoman rĂ©alisĂ© par Pitof en 2003, la super-hĂ©roĂŻne n’est plus, comme c’était le cas avec Selina Kyle et Holly Robinson dans les comics, une femme dĂ©guisĂ©e en chatte, mais elle subit une vĂ©ritable mĂ©tamorphose physiologique. 10 LoĂŻc Gresh et Robert Weinberg, Les Super-hĂ©ros et la science, Paris, Flammarion, 2004. 11 Le sacrĂ© sauvage, Paris, Payot, 1975 La mythologie moderne », pp. 85-90. 12 François Jost, Le culte du banal. De Duchamp Ă  la tĂ©lĂ©-rĂ©alitĂ©, Paris, CNRS Ă©ditions, 2007. 13 Le sacrifice du latin sacra » et facere », soit l’accomplissement de choses sacrĂ©es »,, ne se rĂ©duit pas au sacrifice physique, au don de sa vie, il est aussi le sacrifice de la vie privĂ©, de l’amour Spiderman, Batman, par exemple, renoncent au grand amour parce qu’ils sont des personnages publics qui dĂ©fendent une cause transcendante. 14 Abraham Moles, La Fonction des mythes dyna­miques dans la construction de l’imaginaire social », in Cahiers de l’imaginaire, n° 5 / 6, 1990. 15 La Politique symbolique, Paris, PUF, Quadrige, 1993, p. 277 et suivantes, p. 303. 16 L’univers d’X-Men possĂšde Ă©galement des person­nages aux noms Ă©vocateurs, tels Cyclope et PhĂ©nix. 17 Alex Nikolavitch, Mythe & Super hĂ©ros, Paris, Les Moutons Ă©lectriques, 2011. 18 François Jost, SĂ©ries policiĂšres et stratĂ©gies de programmation », in Pierre Beylot et GeneviĂšve Sel­lier dir., Les sĂ©ries policiĂšres, Paris, L’Harmattan, 2004, p. 65. 19 20 Super-hĂ©ros pour de vrai », diffusĂ© sur TF1 le 7 janvier 22 Victor Scardigli, Entre science et magie, deux pensĂ©es du monde », in Sylvie Craipeau, GĂ©rard Dubey, Pierre Musso, Bernard PaulrĂ© dir., La Connaissance dans les sociĂ©tĂ©s techniciennes enjeux et dangers de l’industrialisation de la connaissance, Paris, L’Har­mattan, 2009, pp. 81-85. 23 Philippe Guedj, Comics dans la peau des super- hĂ©ros, Paris, TimĂ©e-Éditions, 2006. 24 Jean-Marc LainĂ©, Super-hĂ©ros ! La puissance des masques, Paris, Les Moutons Ă©lectriques, de page Pour citer cet article RĂ©fĂ©rence papier CĂ©line Bryon-Portet, Les super-hĂ©ros, nouvelles figures mythiques des temps modernes ? », Quaderni, 93 2017, 75-84. RĂ©fĂ©rence Ă©lectronique CĂ©line Bryon-Portet, Les super-hĂ©ros, nouvelles figures mythiques des temps modernes ? », Quaderni [En ligne], 93 Printemps 2017, mis en ligne le 05 mai 2019, consultĂ© le 21 aoĂ»t 2022. URL ; DOI de page Auteur CĂ©line Bryon-PortetUniversitĂ© Paul ValĂ©ry - Montpellier 3LERSEM – IRSAArticles du mĂȘme auteur Haut de page Droits d’auteur Tous droits rĂ©servĂ©sHaut de page

Celuiqui se bat pour une idĂ©e ou pour un idĂ©al est plus fort mentalement: tel un chevalier des temps modernes, il peut dĂ©fendre aussi des valeurs et devient, comme on disait jadis, le champion 1 d’une cause. Champion dans la tĂȘte, dans le sport et dans la vie 03/03/2020Michel Kaplan Le Moyen Age X-XVĂš siĂšcle Ă©dition 2008Florian Mazel, FĂ©odalitĂ©s 888-1180Introduction commentaire de texte aidePhrase d’accrocheContexteSource 1. Nature = image, texte, objet, l’archĂ©ologie.AuteurDateContexte = rĂ©alisation, pour qui Expliquez en quelques lignes le contenuProblĂ©matique renvoie Ă  ce que ce texte nous apporte Ă  ce que l’on sait dĂ©jĂ ï‚·Annonce du plan JAMAIS DE PLAN APPARANT DANS CHAQUE PARTIE =annoncer le thĂšme, je cite j’explique, je cite j’explique
 En France on aime les 3parties Chevalier Ansoud de MauleLittĂ©rature Ă©pique chanson de Roland qui raconte l’histoire de se chevalier qui Ă©tait dansl’arriĂšre garde de Charlemagne, qui meurt Ă  Roncevaux en 778, et ce rĂ©cit est Ă©crit Ă  la findu fait de l’influence de l’église, le chevalier est influencĂ© au XiĂšme siĂšcle, elle va changerles pratiques et l’étique des chevaliers, elle a condamnĂ© les violences et les pillages, quic’est traduit par la Paix de Dieu, mouvement par lequel l’Eglise a voulu limiter les fait que l’Eglise va faire des chevaliers un ordre, on avait une conception de l’ordre socialqui se dĂ©veloppe Ă  la fin XI-XIIĂšme siĂšcle. En faisant cela, l’Eglise choisit de condamner lesarmes, mais dit que les chevaliers ont une vraie place dans la sociĂ©tĂ©, mais que s’ils sebattent pour des justes causes et s’ils se battent pour les prĂ©ceptes de l’Eglise. AprĂšs avoir prĂ©sentĂ© le texte de façon gĂ©nĂ©ral, on va rĂ©sumer le texte, le moine fait leportrait du chevalier, en retraçant sa vie de sa jeunesse Ă  sa mort, on voit de grandesqualitĂ©s militaires et spirituelles, il correspond au modĂšle de chevalier que l’Eglise cherche Ă montrer depuis le XiĂšme siĂšcle. La dignitĂ© est liĂ©e au fait que les chevaliers se comportentcomme de bons chrĂ©tiens. Montrer le poids de l’idĂ©ologie chrĂ©tienne sur la dĂ©finition de la chevalerie au XIIĂšmesiĂšcle ? On va Ă©voquer Ansoud en temps que noble chevalier, son comportement de chevaliermodĂšle, et comment il est imprĂ©gnĂ© de la chrĂ©tientĂ© Ansoud de Maule un noble de Chevaliera Une famille de lointaines et nobles originesOn fait rĂ©fĂ©rence au texte on se rĂ©fĂšre Ă  la ligne 10, Ă  la ligne 21, on voit qu’au XIIĂšmesiĂšcle, chevalerie est noblesse sont intimement liĂ©s, c’est le cas en France, mais ce n’estpas le cas dans l’empire allemand, c’est une spĂ©cificitĂ© de la France. Les seigneuries vont seconstituer en France plus rapidement, le mouvement de la Paix de Dieu va jouer. Les nobles LehĂ©ros, demi-dieu au sens mythologique, a Ă©tĂ© pendant longtemps le personnage central de la tragĂ©die, puis du roman.L’imaginaire collectif lui associe le plus souvent la beautĂ©, l’intelligence, la jeunesse et la force physique.Cette reprĂ©sentation, on la retrouve dans les portraits stylisĂ©s et idĂ©alisĂ©s des contes de fĂ©es de l’enfance, oĂč le prince ne peut ĂȘtre que charmant
Culture Critique littĂ©raire Ce conte philosophique autour d’un chevalier du Moyen Age est un divertissement rĂ©ussi. Cet article est paru dans Le Monde » du 7 avril 1962. L’Italie nous envoie ces jours-ci un jeune et sĂ©duisant conteur dans la tradition voltairienne. Car c’est bien Ă  un conte de Voltaire que fait d’abord penser Le Chevalier inexistant, d’Italo Calvino. Une histoire ironique et bouffonne, prestement enlevĂ©e, riche en pĂ©ripĂ©ties multiples, et servant de support Ă  l’auteur pour les condamnations ou les rĂ©flexions que la sociĂ©tĂ© contemporaine lui inspire. Le thĂšme une armure de chevalier sans chevalier et qui se comporte comme un chevalier du Moyen Age. Ce paladin qui n’y est pas » parle, marche, se bat comme un parfait soldat. Mais si l’on soulĂšve la visiĂšre de son heaume, on ne trouve que le vide. A ses cĂŽtĂ©s, d’autres curieux personnages un pauvre hĂšre qui ne se distingue pas du monde qui l’entoure, se croit canard quand il garde les canards, poisson quand il pĂȘche, et soupe quand il mange ; un chevalier qui se prend pour le fils de la sainte confrĂ©rie du Graal tout entiĂšre ; une belle fille qui porte la cuirasse et vit en soudard ; un damoiseau, enfin, sans autre tare que sa bouillante et romanesque adolescence, le seul, avec la soldatesque, qui soit humain. On ne fait pas un conte philosophique sans s’exposer Ă  quelques dĂ©boires. L’auteur a eu quelques surprises dans l’interprĂ©tation qu’on a donnĂ©e de son livre. Italo Calvino occupe une place bien en vue dans la littĂ©rature italienne. Il la doit Ă  une Ɠuvre originale qui est prisĂ©e de 30 000 Ă  40 000 exemplaires pour chacun de ses livres et Ă  ses fonctions il est directeur littĂ©raire des Ă©ditions Einaudi. Imaginez un Jean Paulhan qui aurait Ă  peine 40 ans et qui, pour laisser libre cours Ă  sa fantaisie satirique, donnerait dans le genre fantastique. Car les deux autres livres d’Italo Calvino, Le Vicomte pourfendu et Le Baron perchĂ©, sont de la mĂȘme veine. Elle est aussi rare en Italie qu’ici, et c’est des deux cĂŽtĂ©s des Alpes, ce qui lui donne son prix. Mais on ne fait pas un conte philosophique sans s’exposer Ă  quelques dĂ©boires. Italo Calvino n’a pas assistĂ© au lancement en France de son Chevalier inexistant. La critique s’en est donc saisie sans entendre l’auteur, qui a eu quelques surprises dans l’interprĂ©tation qu’on a donnĂ©e de son livre. Il vient d’arriver Ă  Paris, pas fĂąchĂ© sans doute de s’expliquer sur le fond On a compris le Chevalier inexistant comme une parodie des chansons de geste. Est-ce qu’on peut parodier autre chose que les modes de son temps ? C’était bon pour l’Arioste. Ah ! certes, je suis nourri de l’Arioste, qui sait si bien jouer avec ce qu’il admire l’idĂ©al chevaleresque. Mais de lĂ  Ă  imiter son dessein !
 Le mien est tout autre. J’ai voulu peindre un homme qui n’existait que par ses fonctions un militaire, un fonctionnaire, qui que ce soit, assujetti a une tĂąche qui le mĂ©canise. Il a avalĂ© un rĂšglement. Les drames humains ne le concernent plus. Il n’est que discipline, ordre, travail mĂ©thode
 L’idĂ©e m’en est venue aprĂšs l’achat de ma premiĂšre voiture. Une fois dedans, je disparaissais comme Ă  l’intĂ©rieur d’une armure. Qui dit armure dit Moyen Age. Comment vouliez-vous que les aventures de ce bonhomme robot se dĂ©roulent ailleurs qu’à la cour de Charlemagne ? De lĂ  aux coups d’estoc et de taille
 » L’autre erreur commise m’a bien plus surpris encore. Parce que le hĂ©ros, qui a un nom charmant Agilulfe des Guildivernes et autres 
, avait gagnĂ© son titre de chevalier dans la dĂ©fense d’une vierge qui se rĂ©vĂšle ne pas l’ĂȘtre autant qu’on l’avait cru, on a vu dans mon livre une attaque contre la virginitĂ© et l’importance qu’on lui accorde en Italie. Je n’ai jamais eu cela dans l’esprit. » C’est qu’en rationalistes que nous sommes, nous avons pris les aventures trop au sĂ©rieux
 Mais oui, l’histoire en elle-mĂȘme ne signifie rien. C’est Ă  travers mes personnages que je raille le chevalier, nous l’avons vu ; mon pauvre hĂšre – ProtĂ©e –, c’est le primitif, le sauvage qui ne se sĂ©pare pas du monde extĂ©rieur, mais aussi l’art moderne qui ne distingue plus entre le sujet et l’objet ; Ă  travers les chevaliers du Graal, tous ces mystiques dĂ©cadents qui se rĂ©clament de l’hindouisme et du zen
 » Une petite pointe de progressisme dans la rĂ©volte des paysans contre ces chevaliers ? Oui. c’est le peuple qui se libĂšre de l’oppression
 Une fois les pions mis en place, avec leur signification, eh bien ! j’ai jouĂ© avec eux une partie d’échecs. J’aime l’aventure, l’imaginaire, la fantaisie, les pirouettes, Voltaire, certes, mais aussi Stevenson. » Et nous aussi, nous nous laissons prendre Ă  ce conte qu’il ne faut point forcer. Il a dĂ©jĂ  bien assez d’intentions comme cela – voire un peu trop. La drĂŽlerie de l’expression, de l’invention, le rythme du rĂ©cit
 et ce pauvre chevalier qu’on finit par aimer parce que l’auteur s’y retrouve lui-mĂȘme, composent un divertissement rĂ©ussi. Une bonne soirĂ©e d’intelligentes et facĂ©tieuses marionnettes. Le Chevalier inexistant, d’Italo Calvino 1959. PremiĂšre Ă©dition en français Seuil 1962. Rééd. Gallimard 2018, traduit de l’italien par Martin Rueff, 1962 p., 16 €; Folio » 2019, 224 p., 7,40 €. Les 100 romans du Monde » Le Monde vous invite Ă  la lecture dĂ©couvrez les 100 romans qui ont le plus enthousiasmĂ© nos journalistes depuis 1944. Vous pouvez retrouver le supplĂ©ment que Le Monde a consacrĂ© Ă  cette sĂ©lection dans le kiosque numĂ©rique rĂ©servĂ© Ă  nos abonnĂ©s. A propos du partenariat avec les 100 romans de notre liste ont Ă©tĂ© sĂ©lectionnĂ©s de maniĂšre indĂ©pendante par la rĂ©daction. Le Monde » et perçoivent une rĂ©munĂ©ration lorsqu’un de nos lecteurs procĂšde Ă  un achat en ligne sur le site des libraires. Jacqueline Piatier Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil Ă  la fois Ce message s’affichera sur l’autre appareil. DĂ©couvrir les offres multicomptes Parce qu’une autre personne ou vous est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil. Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil Ă  la fois ordinateur, tĂ©lĂ©phone ou tablette. Comment ne plus voir ce message ? En cliquant sur » et en vous assurant que vous ĂȘtes la seule personne Ă  consulter Le Monde avec ce compte. Que se passera-t-il si vous continuez Ă  lire ici ? Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connectĂ© avec ce compte. Y a-t-il d’autres limites ? Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant Ă  des moments diffĂ©rents. Vous ignorez qui est l’autre personne ? Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.
AprÚstout, il est chevalier, fils de chevalier, petit-fils de chevalier, arriÚre-petit-fils de chevalier, et ainsi de suite. Au bout de quelques jours de voyage, Lucas aperçoit enfin un chùteau et une tour. Tout semble désert, mais le jeune homme se méfie, car il se rappelle bien les histoires du Grand Livre Bleu : le parcours du chevalier est souvent piégé. Il continue d'avancer sur
Miguel de CERVANTES L'IngĂ©nieux hidalgo Don Quichotte de la Manche 1605 Voir sur Amazon border l'Ɠuvre de Cervantes ne va pas sans mal si le personnage est connu, il l'est comme on connaĂźt un mythe, sans trop savoir au fond ce qui le constitue, en reprenant au hasard des lieux communs et des formules, applicables Ă  des situations d'ailleurs contradictoires. Quant au roman, il a tĂŽt fait de dĂ©courager par la complexitĂ© de sa syntaxe, ses inĂ©vitables longueurs et tous les tiroirs propres Ă  l'esthĂ©tique baroque. Il fallait oser sans doute bousculer le chef-d'Ɠuvre, lui refuser ce respect si mortifĂšre qu'on voue aux "classiques" pour que, naturellement, tout retrouve sa vigueur et, au fond, sa simplicitĂ©. C'est ce qu'a fait Aline Schulman1 dans la traduction qu'on a si heureusement inscrite Ă  notre programme les dĂ©tours alambiquĂ©s de la phrase y sont prestement contournĂ©s, et l'on refuse Ă  ce cul-terreux de Sancho l'emploi de l'imparfait du subjonctif. VoilĂ  qui devrait insuffler Ă  notre lecture l'Ă©lan indispensable, au moins pour Ă©viter de mĂ©riter la libĂ©ralitĂ© mĂ©prisante du vieil hidalgo Ă  l'endroit de son Ă©cuyer Dors, toi qui es nĂ© pour dormir... » Un tel personnage semblera trouver naturellement sa place au sein d'un programme destinĂ© Ă  s'interroger sur les "puissances de l'imagination". Et pourtant, n'y a-t-il pas aussi quelque paradoxe Ă  le placer sous cette banniĂšre, lui qui, au fond, ne fait qu'emprunter leurs motifs et leurs personnages Ă  des livres et s'entĂȘte Ă  les respecter Ă  la lettre ? Certes, son imagination est bel et bien frappĂ©e par les Ă©popĂ©es chevaleresques au point de voir ce qui n'existe pas, mais pour peu qu'on s'avise de donner au mot imagination son sens plein "facultĂ© de crĂ©er, d'inventer des images, des formes ou des figures nouvelles", on se trouve devant une ambiguĂŻtĂ© prĂ©occupante. Le fait est que Don Quichotte n'invente rien mĂȘme pas son nom, Ă  peine dĂ©rivĂ© de son patronyme probable Quichana il rebaptise, tout au plus, et manifeste en un certain sens un conformisme Ă  toute Ă©preuve. Que signifie alors l'adjectif "ingĂ©nieux" dont le pare le titre du roman, l'ingenium latin dĂ©signe un gĂ©nie crĂ©ateur ? L'imagination de Don Quichotte est-elle une simple activitĂ© mĂ©morielle, ou recouvre-t-elle une volontĂ© plus active de crĂ©ation ? Si oui, quel sens faut-il lui donner dans l'Ă©poque charniĂšre qui est la sienne ? Le modĂšle livresque L'intention affichĂ©e par l'auteur dans le Prologue est de ruiner le crĂ©dit et l'autoritĂ© qu'ont dans le monde et parmi le vulgaire les romans de chevalerie » et de le faire de maniĂšre que le lecteur mĂ©lancolique ne puisse s'empĂȘcher de rire ». Don Quichotte se prĂ©sente ainsi comme un roman parodique d'un genre Ă  la mode, et le hĂ©ros Ă©ponyme est d'emblĂ©e affublĂ© d'une Ă©trange folie Il avait Ă  toute heure et Ă  chaque instant l'imagination remplie des combats, des dĂ©fis, des enchantements, des aventures, des amours, bref, de ces absurditĂ©s que l'on trouve dans les romans de chevalerie, et tout ce qu'il disait, pensait ou faisait n'avait d'autre but que de s'y conformer » ch. XVIII, p. 187. FrĂšre aĂźnĂ© d'Emma Bovary, Don Quichotte confond le livre et la rĂ©alitĂ©, ce qui ne peut manquer de se solder par une imitation constante du modĂšle de papier. Ainsi dans ce dĂ©lire Ă©tourdissant du chapitre XVIII, oĂč, face Ă  deux troupeaux de moutons, le chevalier dĂ©taille pour Sancho ahuri les deux armĂ©es qu'il voit devant lui, tant il Ă©tait imprĂ©gnĂ© de ce qu'il avait lu dans ses livres mensongers » p. 190. Son dĂ©sir lui fait ordonner son dĂ©lire la cascade des noms et des titres, identifiĂ©s sans hĂ©sitation, finissent dans leur mĂ©lange par crĂ©er toute une armĂ©e mythologique, l'allĂ©gorie vibrante de l'Ennemi. Ce psittacisme doit nous faire rĂ©flĂ©chir Ă  la nature de son imagination elle n'est d'abord faite que d'imitation, d'une activitĂ© purement mĂ©morielle quoique combinatoire. L'ingĂ©niositĂ© de Don Quichotte ne sert ici qu'Ă  l'enfermer dans sa schizophrĂ©nie car, jamais, l'Ă©vidence du rĂ©el, reprĂ©sentĂ©e si souvent par Sancho, n'est capable de le dĂ©tromper. Il y a toujours quelque enchanteur pour avoir au dernier moment transformĂ© les gĂ©ants en moulins Ă  vent 102, deux escadrons de soldats en troupeaux de moutons 192 ou fait en sorte que les gens du vulgaire ne voient qu'un plat Ă  barbe dans ce qui est bel et bien le heaume de Mambrin 270. Cette invocation perpĂ©tuelle de la magie tient lieu de raison Ă  ce dĂ©ment car le Livre est pour lui un code de conduite qui jalonne son parcours de valeurs-repĂšres, un viatique indispensable qui justifie son infortune et supplĂ©e Ă  l'arbitraire comme Ă  la mĂ©diocritĂ© du rĂ©el. Don Quichotte n'est pas l'homme de l'extravagance, mais plutĂŽt le pĂšlerin mĂ©ticuleux qui fait Ă©tape devant toutes les marques de la similitude. Il est le hĂ©ros du MĂȘme. Pas plus que de son Ă©troite province, il ne parvient Ă  s'Ă©loigner de la plaine familiĂšre qui s'Ă©tale autour de l'Analogue. IndĂ©finiment il la parcourt, sans franchir jamais les frontiĂšres nettes de la diffĂ©rence, ni rejoindre le cƓur de l'identitĂ©. Or, il est lui-mĂȘme Ă  la ressemblance des signes. Long graphisme maigre comme une lettre, il vient d'Ă©chapper tout droit du bĂąillement des livres. Tout son ĂȘtre n'est que langage, texte, feuillets imprimĂ©s, histoire dĂ©jĂ  transcrite. Il est fait de mots entrecroisĂ©s; c'est de l'Ă©criture errant dans le monde parmi la ressemblance des choses. Pas tout Ă  fait cependant car en sa rĂ©alitĂ© de pauvre hidalgo, il ne peut devenir le chevalier qu'en Ă©coutant de loin l'Ă©popĂ©e sĂ©culaire qui formule la Loi. Le livre est moins son existence que son devoir. Sans cesse il doit le consulter afin de savoir que faire et que dire, et quels signes donner Ă  lui-mĂȘme et aux autres pour montrer qu'il est bien de mĂȘme nature que le texte dont il est issu. Les romans de chevalerie ont Ă©crit une fois pour toutes la prescription de son aventure. Et chaque Ă©pisode, chaque dĂ©cision, chaque exploit seront signes que Don Quichotte est en effet semblable Ă  tous ces signes qu'il a dĂ©calquĂ©s. Mais s'il veut leur ĂȘtre semblable, c'est qu'il doit les prouver, c'est que dĂ©jĂ  les signes lisibles ne sont plus Ă  la ressemblance des ĂȘtres visibles. Tous ces textes Ă©crits, tous ces romans extravagants sont justement sans pareils nul dans le monde ne leur a jamais ressemblĂ©; leur langage infini reste en suspens, sans qu'aucune similitude vienne jamais le remplir; ils peuvent brĂ»ler tout et tout entiers, la figure du monde n'en sera pas changĂ©e. En ressemblant aux textes dont il est le tĂ©moin, le reprĂ©sentant, le rĂ©el analogue, Don Quichotte doit fournir la dĂ©monstration et apporter la marque indubitable qu'ils disent vrais, qu'ils sont bien le langage du monde. Il lui incombe de remplir la promesse des livres. A lui de refaire l'Ă©popĂ©e, mais en sens inverse celle-ci racontait prĂ©tendait raconter des exploits rĂ©els promis Ă  la mĂ©moire; Don Quichotte, lui, doit combler de rĂ©alitĂ© les signes sans contenu du rĂ©cit. Son aventure sera un dĂ©chiffrement du monde un parcours minutieux pour relever sur toute la surface de la terre des figures qui montrent que les livres disent vrai. L'exploit doit ĂȘtre preuve il consiste non pas Ă  triompher rĂ©ellement – c'est pourquoi la victoire n'importe pas au fond –, mais Ă  transformer la rĂ©alitĂ© en signe. En signe que les signes du langage sont bien conformes aux choses elles-mĂȘmes. Don Quichotte lit le monde pour dĂ©montrer les livres. Et il ne se donne d'autres preuves que le miroitement des ressemblances. Tout son chemin est une quĂȘte aux similitudes les moindres analogies sont sollicitĂ©es comme des signes assoupis qu'on doit rĂ©veiller pour qu'ils se mettent de nouveau Ă  parler. Les troupeaux, les servantes, les auberges redeviennent le langage des livres dans la mesure imperceptible oĂč ils ressemblent aux chĂąteaux, aux dames et aux armĂ©es. Ressemblance toujours déçue qui transforme la preuve cherchĂ©e en dĂ©rision et laisse indĂ©finiment creuse la parole des livres. Mais la non-similitude elle-mĂȘme a son modĂšle qu'elle imite servilement elle le trouve dans la mĂ©tamorphose des enchanteurs. Si bien que tous les indices de la non-ressemblance, tous les signes qui montrent que les textes Ă©crits ne disent pas vrai, ressemblent Ă  ce jeu de l'ensorcellement qui introduit par ruse la diffĂ©rence dans l'indubitable de la similitude. Et puisque cette magie a Ă©tĂ© prĂ©vue et dĂ©crite dans les livres, la diffĂ©rence illusoire qu'elle introduit ne sera jamais qu'une similitude enchantĂ©e. Donc un signe supplĂ©mentaire que les signes ressemblent bien Ă  la vĂ©ritĂ©. Michel Foucault, Les Mots et les Choses 1966. En personnage de la Renaissance, Don Quichotte revendique l'imitation comme la voie la plus juste de la perfection comme le peintre s'efforce d'imiter les tableaux des grands maĂźtres, le chevalier errant qui imitera le mieux Amadis de Gaule approchera au plus prĂšs de la perfection de la chevalerie ». Fort de cette conviction, il multiplie les occasions de ressembler Ă  son modĂšle, d'autant plus quand les circonstances s'y prĂȘtent pauvrement. Parfois, en effet, le dĂ©lire de Don Quichotte est comme planifiĂ©, comme peut l'ĂȘtre une ascĂšse systĂ©matique. Ici sa folie semble pouvoir s'accommoder d'une entreprise tout expĂ©rimentale. Ainsi dans ce chapitre oĂč il choisit d'imiter la folie du chevalier trahi par sa dame, comme un vĂ©ritable thĂšme, une sorte d'exercice. À l'Ă©tonnement de Sancho, il peut dĂšs lors rĂ©torquer Qu'un chevalier errant devienne fou pour une raison, bonne ou mauvaise, on n'a pas Ă  lui en savoir grĂ©. Mon mĂ©rite est de perdre le jugement sans motif, donnant ainsi Ă  penser Ă  ma dame que, si je fais cela Ă  froid, que ne ferais-je Ă  chaud ! [...] Ainsi donc, Sancho, ne perds pas de temps avec tes conseils je ne renoncerai pas Ă  une imitation si rare, si heureuse, si nouvelle. Fou je suis, et fou je serai jusqu'Ă  ce que tu reviennes, avec la rĂ©ponse Ă  une lettre que tu vas aller porter de ma part Ă  ma dame DulcinĂ©e. » ch. XXV, p. 269. Il faut pour cela tenir compte de la part de volontĂ© qui entre dans l'imagination de Don Quichotte. A plusieurs reprises, sa clairvoyance, voire sa pondĂ©ration, nous Ă©tonnent et justifient la remarque du curĂ© Mis Ă  part les sottises qu'il dĂ©bite sur tout ce qui concerne sa folie, dĂšs qu'on parle avec lui d'autre chose, ses propos sont empreints de bon sens et il s'exprime avec clartĂ© et discernement. Aussi, tant qu'on ne touche pas Ă  la chevalerie, personne ne peut croire qu'il a perdu la tĂȘte. » ch. XXX, p. 346. Souvent, l'application mise Ă  croire en ses fantasmes laisse le lecteur perplexe sur la nature de ses Ă©garements bien des indices laissent Ă  penser qu'ils sont concertĂ©s, comme ces invocations adressĂ©es Ă  la Nature et Ă  DulcinĂ©e sur le mode de la lamentation 270-271 ou cette remarque adressĂ©e Ă  Sancho lorsque celui-ci dĂ©couvre que DulcinĂ©e n'est qu'Aldonza Lorenzo, "solide garce" du pays Pour ce que j'attends de DulcinĂ©e, elle vaut pour moi la plus grande princesse de la terre.[...] Il me suffit donc de dĂ©cider et de croire que la bonne Aldonza Lorenzo est belle et honnĂȘte.[...] En un mot, j'imagine que ce que je dis est comme je le dis, ni plus ni moins; et je la vois en esprit telle que la veut mon dĂ©sir. » Sur ce plan, Don Quichotte manifeste un idĂ©alisme absolu les ĂȘtres valent mieux par leur Ăąme que par leur enveloppe charnelle ou leur identitĂ© sociale. Le rĂŽle du Chevalier est de dĂ©signer cette part idĂ©ale Ă  l'attention des intĂ©ressĂ©s, de les nommer comme en un second baptĂȘme et d'interdire Ă  quiconque de douter de cette vĂ©ritĂ© manifeste L'important est de le croire sans la voir. » 80 L'imagination de Don Quichotte, si elle est constituĂ©e d'une fĂȘlure initiale, est ainsi destinĂ©e Ă  entretenir une illusion, dĂ©fendue bec et ongles contre le prosaĂŻsme du rĂ©el et la plate insignifiance des choses. L'obĂ©dience du personnage Ă  ses modĂšles chevaleresques est moins passive qu'il n'y paraĂźt, puisqu'elle est un choix de vie dont aucun des protagonistes du vieil hidalgo ne parvient Ă  faire oublier la grandeur. Un hĂ©ros problĂ©matique Cette grandeur de Don Quichotte apparaĂźtra plus nettement au moindre dĂ©placement de l'intention parodique de l'auteur vers son propos politique. Car les pĂ©rĂ©grinations du personnage seraient seulement ridicules si le monde qu'il parcourt Ă©tait exempt lui-mĂȘme de folie. Mais la dĂ©raison de ce temps est d'un autre acabit, qui fait du chevalier l'apĂŽtre obstinĂ© d'un IdĂ©al dĂ©sormais dĂ©passĂ©. Comme le note Georg LukĂĄcs, avec Don Quichotte, "la sublimitĂ© devient folie" parce que cette sorte d'ĂȘtre ne peut s'exprimer dans le monde qu'Ă  travers des aventures inadĂ©quates. Dans un autre cadre, confrontĂ© Ă  la rĂ©alitĂ© palpable de ses dĂ©mons, et patronnĂ© par une idĂ©ologie de l'Esprit – religieuse ou autre –, Don Quichotte serait un hĂ©ros Ă©pique. Mais il n'est ici que problĂ©matique – c'est-Ă -dire romanesque – puisque porteur de valeurs qualitatives dans un monde inauthentique vouĂ©, lui, aux valeurs marchandes Le temps oĂč a vĂ©cu Cervantes fut celui qui assista Ă  la derniĂšre floraison d'une grande mystique dĂ©sespĂ©rĂ©e, Ă  l'effort fanatique d'une religion en train de sombrer pour se rĂ©nover par ses propres forces; le temps qui vit se dĂ©velopper une nouvelle connaissance du monde, sous des formes mystiques; la derniĂšre Ă©poque des aspirations occultes, rĂ©ellement vĂ©cues, mais dĂ©jĂ  privĂ©es de leur fin, tout ensemble curieuses et captieuses. Ce temps est celui du dĂ©monisme en libertĂ©, de la grande confusion des valeurs Ă  l'intĂ©rieur d'un systĂšme axiologique encore subsistant. Et Cervantes, en tant que chrĂ©tien fidĂšle et patriote naĂŻvement loyal, a atteint l'essence la plus profonde de cette problĂ©matique dĂ©monique dans son Ɠuvre littĂ©raire, la nĂ©cessitĂ©, pour l'hĂ©roĂŻsme le plus pur, de tourner au grotesque, pour la foi la plus ferme, de se muer en folie, dĂšs lors que les voies qui conduisent Ă  sa patrie transcendantale sont devenues impraticables, l'impossibilitĂ© que la plus pure, la plus hĂ©roĂŻque Ă©vidence subjective corresponde au rĂ©el effectif. C'est la mĂ©lancolie profonde du cours mĂȘme de l'histoire, de la fuite du temps qui montre ainsi que des contenus Ă©ternels, que des attitudes Ă©ternelles perdent leur sens dĂšs qu'ils ont fait leur temps - que le temps peut dĂ©passer l'Ă©ternel. C'est le premier grand combat de l'intĂ©rioritĂ© contre la bassesse prosaĂŻque de la vie extĂ©rieure, et l'unique combat oĂč elle ait rĂ©ussi non seulement Ă  quitter sans tache le champ de bataille, mais mĂȘme Ă  faire rayonner sur son adversaire victorieux l'Ă©clat de sa propre poĂ©sie victorieuse bien qu'ironique Ă  l'Ă©gard d'elle-mĂȘme. Georg LUKÁCS, La thĂ©orie du roman, 1920. L'imagination est donc cette force par laquelle Don Quichotte s'arme chevalier dans des "temps calamiteux" du coup, sans se dĂ©partir jamais de l'ironie qui peut accabler son personnage, ni de cette distance avec son Ɠuvre qui lui souffle d'authentifier un Sidi Ahmed Benengeli comme vĂ©ritable auteur, Cervantes multiplie les voix plurielles, les registres opposĂ©s, bref, toute une Ă©criture proprement baroque qui enrichit considĂ©rablement l'une et l'autre et Ă©vite de conclure. En ce sens, rien n'est moins apologĂ©tique que Don Quichotte le lecteur aura toujours la possibilitĂ© de conforter sa raison dans les avanies qui couvrent le personnage de ridicule; il pourra tout aussi bien le plaindre de ses infortunes ou partager ses colĂšres, puisque telle est, semble-t-il, sa vraie force. Mais jamais on ne pourra clairement dĂ©terminer la part prise par telle ou telle conviction d'ordre idĂ©ologique dans la conduite de la narration d'une page Ă  l'autre, les avis peuvent se trouver contradictoires, les personnages se mettent Ă  revĂȘtir des aspects inattendus, comme s'il importait d'abord de balayer les certitudes. Avec sa nostalgie du passĂ©, sa croyance Ă  l'unitĂ© et son amour fanatique de l'ordre, il est celui qui sĂšme le trouble, Ă©branle dogme et certitudes, dĂ©nonce scandaleusement tous les liens. Et cela [...] sans fomenter de rĂ©volte ouverte, en pratiquant une continuelle interprĂ©tation du monde qui met la rĂ©alitĂ© en cause et est Ă  elle seule une entreprise de subversion. Don Quichotte est obligĂ© d'interprĂ©ter parce que, littĂ©ralement et au double sens du mot, il ne reconnaĂźt pas ce qui est, de sorte qu'au lieu de voir les choses, de les ressentir et de saisir immĂ©diatement leurs rapports, il lui faut les comparer au modĂšle qu'il a en tĂȘte, afin de les accepter ou de les refuser selon qu'elles sont conformes ou non Ă  ses souvenirs. Tout se passe comme s'il n'avait jamais vu les objet les plus courants, un plat Ă  barbe le met hors de lui, il s'Ă©bahit devant une procession, les choses ordinaires le dĂ©concertent et, d'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, ses souvenirs concrets sont incroyablement faibles et brouillĂ©s. Mais pour son affaire il a une mĂ©moire prodigieuse, qui lui permet de compenser tant bien que mal son dĂ©faut total d'expĂ©rience de vie ce contraste entre la faiblesse de ses souvenirs rĂ©els et et l'infaillibilitĂ© de ses souvenirs livresques lui joue souvent de fort mauvais tours; dans l'histoire des PĂ©nitents il manque de le perdre, car il ne reconnaĂźt pas la Vierge. Tout de mĂȘme que les hĂ©ros homĂ©riques, eux aussi douĂ©s d'une mĂ©moire hors pair, se rĂ©fĂšrent Ă  un prĂ©cĂ©dent mythique pour lĂ©gitimer leurs actes et jusqu'aux Ă©vĂ©nements futiles de chaque jour, il interprĂšte la rĂ©alitĂ© en fonction d'un prĂ©cĂ©dent romanesque, destinĂ© Ă  lui communiquer les significations dont il n'a pas une perception directe. C'est pourtant dans cette part de son imitation, si conformiste en apparence, qu'il rĂ©vĂšle le mieux les raisons profondes de son insoumission. Marthe ROBERT, L'Ancien et le Nouveau, 1963. Mais cette insoumission – mĂȘme si Don Quichotte affirme qu' on peut dire de la chevalerie errante comme de l'amour, qu'elle nous rend tous Ă©gaux » 125 – n'est guĂšre politique elle conteste plutĂŽt l'image Ă  laquelle on rĂ©duit l'homme, ou Ă  laquelle il se rĂ©duit lui-mĂȘme, faute d'Ă©nergie ou d'ambition. A preuve sa colĂšre quand le prisonnier qu'il vient de libĂ©rer inconsidĂ©rĂ©ment refuse d'aller chanter sa louange aux pieds de DulcinĂ©e Puisqu'il en est ainsi, monsieur le fils de putain, sieur GinĂ©sille de Pacotille, ou de je ne sais trop quoi, vous irez lĂ -bas tout seul, la queue entre les jambes, avec toute la chaĂźne sur le dos ! » 241. A preuve encore ses frĂ©quents emportements contre l'Ă©troitesse de Sancho, qu'il a entrepris d'Ă©lever Ă  la dignitĂ© d'Ă©cuyer et de gouverneur, et ses imprĂ©cations contre les archers de la Santa-Hermandad, magnifiques d'insolence et de conviction gĂ©nĂ©reuse ch. XLV, On ira sans trop d'audace prononcer le mot de saintetĂ©. Les rĂ©fĂ©rences christiques s'imposent Ă©videmment, comme pour L'Idiot de DostoĂŻevski, d'autant que l'ascĂšse du personnage est souvent soulignĂ©e dans ses formes les plus Ăąpres Je ne prĂ©tends pas, et l'idĂ©e ne m'a mĂȘme pas traversĂ© l'esprit, que l'Ă©tat de chevalier errant soit aussi saint que celui du religieux cloĂźtrĂ©; mais je peux infĂ©rer des maux que j'endure que cet Ă©tat est sans aucun doute plus dur et plus difficile, qu'on y est plus affamĂ©, plus assoiffĂ©, plus misĂ©rable, plus dĂ©guenillĂ©, plus pouilleux. » ch. XIII, p. 142. Ces vertus stoĂŻques qui font supporter en effet Ă  Don Quichotte bien des coups et des humiliations lui paraissent les voies nĂ©cessaires dont il importe de ne pas dĂ©mĂ©riter. La prĂ©sence de Sancho lui est certes indispensable pour en tĂ©moigner, mais, seul aussi, dans l'ascĂšse rĂȘveuse de la sierra Morena et sous l'autoritĂ© magistrale du Livre qu'il invoque sans cesse, le hĂ©ros souhaite d'abord ne pas dĂ©mĂ©riter Ă  ses propres yeux, comme le proclame cette belle dĂ©claration du livre II Chevalier je suis, et chevalier je mourrai, s'il plaĂźt au TrĂšs-Haut. Les uns suivent le large chemin de l'orgueilleuse ambition; d'autres celui de l'hypocrisie trompeuse; et quelques-uns enfin, celui de la religion sincĂšre. Quant Ă  moi, poussĂ© par mon Ă©toile, je marche dans l'Ă©troit sentier de la chevalerie errante; mĂ©prisant, pour exercer cette profession, la fortune mais non point l'honneur, j'ai vengĂ© des injures, redressĂ© des torts, chĂątiĂ© des insolences, vaincu des gĂ©ants, affrontĂ© des monstres et des fantĂŽmes. Je suis amoureux, uniquement parce qu'il est indispensable que les chevaliers errants le soient et l'Ă©tant, je ne suis pas des amoureux dĂ©rĂ©glĂ©s, mais des amoureux continents et platoniques. Mes intentions sont toujours dirigĂ©es Ă  bonne fin, c'est-Ă -dire Ă  faire du bien Ă  tous, Ă  ne faire de mal Ă  personne. Si celui qui pense ainsi, qui agit ainsi, qui s'efforce de mettre tout cela en pratique, mĂ©rite qu'on l'appelle nigaud, je m'en rapporte Ă  Vos Grandeurs, duc et duchesse. » II, ch. XXXII Âge d'or, Ăąge de fer L'imagination de Don Quichotte tient de la rĂȘverie patriarcale. Conservateur, il Ă©voque souvent l'ordre ancien en de sempiternelles formules qu'on retrouvera sous la plume de FĂ©nelon, Montesquieu, Rousseau... c'est la traditionnelle opposition de l'Âge d'or Ă  l'Ăąge de fer. A vrai dire, ce thĂšme dĂ©jĂ  vieux est encore Ă  la mode Ă  l'Ă©poque de Cervantes, oĂč il constitue la toile de fond obligatoire des "bergeries" et des Ă©glogues bucoliques. Dans la bouche de Don Quichotte, il ne quitte pas ses attributs convenus Heureuse Ă©poque, siĂšcles bĂ©nis que les Anciens ont nommĂ©s l'Ăąge d'or ! [...] En ces temps bĂ©nis, tout Ă©tait commun Ă  tous. Pour trouver sa nourriture, il suffisait Ă  l'homme de lever la main pour cueillir le fruit doux et savoureux que le chĂȘne robuste lui tendait gracieusement. » etc. ch. XI, Cette Arcadie imaginaire, comme chez tous les penseurs millĂ©naristes, alimente en fait le procĂšs contre les temps modernes. Aux yeux de Don Quichotte, ceux-ci consacrent, contre l'ordre auquel il appartient, la mĂ©chancetĂ© grandissante de l'homme. Si l'on recense les grands flĂ©aux auxquels se heurte le chevalier errant, on identifiera d'abord, sur cette grande page qu'est la plaine de la Mancha, les signes Ă©vidents d'une activitĂ© Ă©conomique industrieuse et ceux, non moins palpables de l'oppression politique et religieuse. L'Ăąge de fer est celui du travail et des cages. Monde sans imagination, "temps nĂ©cessiteux" qu'il convient donc d'amender Apprends, Sancho, que le ciel m'a fait naĂźtre dans cet Ăąge de fer pour redonner vie Ă  celui que l'on nomme l'Ăąge d'or » ch. XX, La mission dont s'investit le Chevalier consiste-t-elle Ă  redonner Ă  l'imagination la place qu'elle a perdue ? Lorsqu'il stigmatise "les temps dĂ©testables oĂč nous vivons", Don Quichotte ne voit Ă  s'enflammer que contre la pestilence de l'amour galant et les "Ă©tranges artifices" dont se parent les dames de cour. Mais, tout au long de ses pĂ©rĂ©grinations, on saisit bien oĂč se situe l'indignitĂ© de ce temps raisonneur et intĂ©ressĂ© qui a perdu le sens des valeurs c'est toujours faute de croire, de manifester confiance et fidĂ©litĂ©, comme si cette humanitĂ© dĂ©couragĂ©e manifestait par lĂ  le malheur de sa dĂ©rĂ©liction. Rien n'est plus dĂ©monstratif que les efforts inadĂ©quats, mais vraiment hĂ©roĂŻques de Don Quichotte, pour retrouver cette norme Ă©pique qui, jadis, maintenait la plĂ©nitude de la vie ainsi que la beautĂ© de l'art et s'est lentement perdue au cours des siĂšcles. Pour les contemporains de Cervantes, une telle norme n'est mĂȘme plus concevable, sauf Ă  partir de quelques vagues souvenirs ceux-lĂ  mĂȘmes que Don Quichotte essaie de ranimer plus encombrants qu'utiles, car entre l'Olympe et la vie, entre les multiples idĂ©aux spirituels et la rĂ©alitĂ© quotidienne, la rupture est irrĂ©mĂ©diablement consommĂ©e. La doctrine chrĂ©tienne, les diverses philosophies, les dogmes et croyances de toute espĂšce ont coupĂ© peu Ă  peu la communication rĂ©guliĂšre du monde d'en bas avec son prototype divin et, par lĂ  mĂȘme, avec les normes unanimement reconnues. Ainsi, l'homme est rentrĂ© en lui-mĂȘme, le surnaturel, transportĂ© dans un domaine purement intĂ©rieur, a cessĂ© d'ĂȘtre un rĂ©servoir de forces vitales et de lois pour devenir une image, un regret ou un dĂ©sir maladif, plus prĂšs de la superstition que de la vĂ©ritĂ©. Don Quichotte prend conscience de cette rupture qui, l'ordre ancien Ă©tant tombĂ© dans l'oubli, passe tout Ă  fait inaperçue autour de lui l'absence de normes est devenue normale, mais le trouble au point de lui rendre l'existence impossible. C'est lĂ  le tourment de sa vie, et l'une des premiĂšres raisons, sinon la seule, qui motivent sa sortie. En sortant, en effet, Don Quichotte ne vise Ă  rien de moins qu'Ă  redonner une norme au monde anarchique de son Ă©poque, qui souffre sans le savoir moins de la faillite des modĂšles spirituels contemporains que de leur Ă©vanouissement, si l'on peut dire, dans une transcendance oĂč ils sont devenus inaccessibles. IdentifiĂ© avec le livre qui incarne Ă  ses yeux l'ordre parfait, un ordre non point statique, mais agissant, capable de rĂ©gulariser et de fĂ©conder le rĂ©el, il entend mettre fin Ă  la sĂ©paration des choses visibles d'avec l'invisible qui est la maladie secrĂšte de ce qu'il appelle l'Âge de fer. Ainsi, la littĂ©rature renouera les liens rompus entre le quotidien et le divin, autrement dit elle assumera par les moyens qui lui sont propres la tĂąche qui incombait jadis Ă  la mythologie. Marthe ROBERT, L'Ancien et le Nouveau, 1963. Le nigaud qui croit en la sincĂ©ritĂ© de l'hypocrite, qui mise sur les bonnes intentions du malfaisant, celui-lĂ  se grandit de sa confiance en l'homme. Cette mĂȘme foi qui inspire l'utopie de ThĂ©lĂšme de Rabelais traverse en effet Don Quichotte. Elle prend d'abord la forme de la conviction souvent rĂ©pĂ©tĂ©e qu'un homme est "fils de ses Ɠuvres" 77 Apprends qu'un homme n'est supĂ©rieur Ă  un autre qu'autant qu'il en fait plus que lui. » 193 Cette remise en cause du dĂ©terminisme social justifiĂ©e par l'action explique le rĂȘve du vieil homme dĂ©cidĂ© Ă  rĂ©concilier les lettres et les armes rendre aux premiĂšres leur vĂ©ritĂ© de chair, aux secondes leur destination gĂ©nĂ©reuse, "dĂ©fendre les faibles et les protĂ©ger de l'oppression des plus forts". C'est armĂ© de cette devise qu'il peut intimer au commissaire l'ordre de libĂ©rer les candidats aux galĂšres Il n'est pas juste de rĂ©duire au rang d'esclaves ceux que Dieu et la nature ont faits libres. [...] Il n'est pas bien que les hommes honnĂȘtes deviennent les bourreaux des autres hommes, quand ils n'y ont aucun motif.» ch. XXII, p. 239. Cette foi en l'homme peut prendre aussi les accents de la colĂšre. A proprement parler, Don Quichotte est hors de lui. La premiĂšre de ses qualitĂ©s est l'impatience impatience de sortir, de se lever, de partir, impatience aussi devant l'apathie, l'Ă©troitesse, l'irrespect des valeurs sur lesquelles il fonde son entreprise. NĂ©gligent des mĂ©faits qu'ils ont pu commettre, c'est aux misĂšres des hommes qu'il est attentif, et les seuls pĂ©chĂ©s qu'il reconnaisse - mais alors sa fureur est terrible - sont le doute ou le sarcasme Ă  l'Ă©gard des valeurs chevaleresques. Parce qu'il a besoin de ces valeurs qui cadrent et justifient son entreprise, il choisit plutĂŽt de voir le chĂątelain sous l'aubergiste, la Dame sous la putain. Son imagination dĂ©passe les apparences, dĂ©busque l'Ăąme sous l'oripeau. De lĂ  ses reproches Ă  Sancho concernant l'Ă©troitesse de son entendement, les quelques raclĂ©es qu'il lui administre, et ses injonctions l'invitant Ă  "garder le front haut" 100. Le sort ambigu de la littĂ©rature Vous, monsieur, vous Ă©tiez fait pour ĂȘtre prĂ©dicateur plutĂŽt que chevalier errant », constate Sancho 194. Le bougre n'a pas si mauvais nez Don Quichotte a du style. Mais ce que l'Ă©cuyer ne voit pas, c'est que ce style-lĂ  sort tout droit des livres, dans des formes invariables qui rappellent parfois les formules homĂ©riques. Don Quichotte les prononce comme des sĂ©sames ou des incantations, au point que Sancho s'avise de les rĂ©citer, par raillerie ch. XX. Car ces sĂ©sames n'ouvrent rien, ces incantations ne provoquent aucun sortilĂšge le monde reste obstinĂ©ment opaque, les cƓurs gardent leur Ă©troitesse. Don Quichotte dessine le nĂ©gatif du monde de la Renaissance; l'Ă©criture a cessĂ© d'ĂȘtre la prose du monde; les ressemblances et les signes ont dĂ©nouĂ© leur vieille entente; les similitudes déçoivent, tournent Ă  la vision et au dĂ©lire; les choses demeurent obstinĂ©ment dans leur identitĂ© ironique elles ne sont plus que ce qu'elles sont; les mots errent Ă  l'aventure, sans contenu, sans ressemblance pour les remplir; ils ne marquent plus les choses; ils dorment entre les feuillets des livres au milieu de la poussiĂšre. La magie, qui permettait le dĂ©chiffrement du monde en dĂ©couvrant les ressemblances secrĂštes sous les signes, ne sert plus qu'Ă  expliquer sur le mode dĂ©lirant pourquoi les analogies sont toujours déçues. L'Ă©rudition qui lisait comme un texte unique la nature et les livres est renvoyĂ©e Ă  ses chimĂšres dĂ©posĂ©s sur les pages jaunies des volumes, les signes du langage n'ont plus pour valeur que la mince fiction de ce qu'ils reprĂ©sentent. L'Ă©criture et les choses ne se ressemblent plus. Entre elles, Don Quichotte erre Ă  l'aventure. [...] Don Quichotte est la premiĂšre des Ɠuvres modernes puisqu'on y voit la raison cruelle des identitĂ©s et des diffĂ©rences se jouer Ă  l'infini des signes et des similitudes; puisque le langage y rompt sa vieille parentĂ© avec les choses, pour entrer dans cette souverainetĂ© solitaire d'oĂč il ne rĂ©apparaĂźtra, en son ĂȘtre abrupt, que devenu littĂ©rature; puisque la ressemblance entre lĂ  dans un Ăąge qui est pour elle celui de la dĂ©raison et de l'imagination. La similitude et les signes une fois dĂ©nouĂ©s, deux expĂ©riences peuvent se constituer et deux personnages apparaĂźtre face Ă  face. Le fou, entendu non pas comme malade mais comme dĂ©viance constituĂ©e et entretenue, comme fonction culturelle indispensable, est devenu, dans l'expĂ©rience occidentale, l'homme des ressemblances sauvages. Ce personnage, tel qu'il est dessinĂ© dans les romans ou le théùtre de l'Ă©poque baroque, et tel qu'il s'est instituĂ© peu Ă  peu jusqu'Ă  la psychiatrie du dix-neuviĂšme siĂšcle, c'est celui qui s'est aliĂ©nĂ© dans l'analogie. Il est le joueur dĂ©rĂ©glĂ© du MĂȘme et de l'Autre. Il prend les choses pour ce qu'elles ne sont pas, et les gens les uns pour les autres; il ignore ses amis, reconnaĂźt les Ă©trangers; il croit dĂ©masquer et il impose un masque. Il inverse toutes les valeurs et les proportions, parce qu'il croit Ă  chaque instant dĂ©chiffrer des signes pour lui les oripeaux font un roi. Michel Foucault, Les Mots et les Choses 1966. En un sens, le roman de Cervantes annonce en effet la mort de l'Ă©crit dans une Ă©poque oĂč s'imposent les valeurs d'Ă©change. Le roman de chevalerie n'est d'ailleurs pas le seul Ă  s'y trouver dĂ©pourvu de sens. L'Ă©glogue champĂȘtre, elle aussi, se voit taxĂ©e de la mĂȘme inaptitude Ă  Ă©pouser le rĂ©el la belle Marcelle rĂ©siste par vƓu de solitude aux feux de Chrysostome bouche d'or... et on enterre le berger aprĂšs avoir brĂ»lĂ© ses Ă©crits ch. XIV. Il est un autre sort pourtant de la littĂ©rature, c'est de se substituer aux textes sacrĂ©s en nous parlant du monde qu'ils ont dĂ©sertĂ©. Le roman, particuliĂšrement, se met, dĂšs cette Ă©poque, Ă  investir le rĂ©el, exigeant justement de l'auteur et des lecteurs toujours plus d'imagination. Heureux, trois fois heureux le siĂšcle oĂč l'intrĂ©pide chevalier Don Quichotte de la Manche vint au monde, s'exclame le narrateur, car [...] il nous offre, en ces temps si pauvres en distractions, le plaisir d'Ă©couter non seulement sa belle et vĂ©ridique histoire, mais les rĂ©cits et nouvelles qu'elle renferme. » ch. XXVIII, p. 309. Il y a plus que cette fonction divertissante, c'est celle de l'Ă©merveillement, dĂ©fendue avec feu par Don Quichotte Ă  la fin du roman contre le chanoine, partisan, lui, du rĂ©alisme. Si la lecture des romans de chevalerie lui paraĂźt de nature Ă  chasser la mĂ©lancolie, il explique en outre comment elle l'a rendu capable de manifester "la gratitude et la gĂ©nĂ©rositĂ© dont [s]on cƓur est plein" 553. [...] En un temps oĂč tout a Ă©tĂ© dit, Ă©crit et enseignĂ©, les conduites idĂ©ales ne s'inventent plus, elles rĂ©sultent d'un mĂ©lange d'imitation et de crĂ©ation dont on ne peut pas dĂ©terminer le dosage. DĂšs lors, la littĂ©rature n'est plus seulement un livre d'images agrĂ©able Ă  feuilleter si vulgaire, mĂ©diocre ou dĂ©gradĂ©e soit-elle, elle fournit un rĂ©pertoire de modĂšles imposants et attachants oĂč les vivants vont se choisir des maĂźtres. Si bien que l'Ă©lĂ©vation quasi religieuse d'Amadis est logique faute de mieux, le roman le plus affadi fait encore fonction de mythe. En soulevant cette grave question – qui est Ă  coup sĂ»r la pensĂ©e la plus profonde du Don Quichotte –, Cervantes place le lecteur devant un fait nouveau, dont les consĂ©quences sont Ă©videmment problĂ©matiques Ă  cause de circonstances en partie extĂ©rieures, en partie exploitĂ©es par elle, la littĂ©rature est promise Ă  un destin inouĂŻ, qui peut ĂȘtre un accomplissement grandiose ou une retentissante faillite. Qu'en sera-t-il dans l'avenir ? Cervantes ne le dit pas, Ă©tant comme on sait bien dĂ©cidĂ© Ă  ne rien conclure. Mais il laisse son hĂ©ros agir, et cela suffit, car Don Quichotte est clairvoyant Ă  la vraie maniĂšre des prophĂštes, c'est-Ă -dire qu'il ne rĂ©vĂšle pas seulement l'avenir, mais dĂ©voile par ses actes de sens du prĂ©sent. En ce jour oĂč il sort pour faire descendre les livres dans la rue, les Ă©crits religieux spĂ©cialisĂ©s parlent de bontĂ©, de vĂ©ritĂ©, de justice et de salut, mais n'ont plus rien Ă  dire sur les dĂ©cisions immĂ©diates de la vie, ils n'enseignent pas comment joindre l'action et la pensĂ©e sans que l'une ou l'autre pĂątisse de l'union, comment faire rĂ©gner rĂ©ellement la justice et, pour celui qui se croit en possession de la vĂ©ritĂ©, comment lui donner force de loi. Or, Don Quichotte a absolument besoin de savoir cela pour vivre, ce qui lui manque n'est pas la connaissance abstraite des principes spirituels ou de prĂ©ceptes moraux, ou encore la voix d'une conscience vigilante la sienne est en Ă©veil, mais perplexe, il lui faut des rĂšgles prĂ©cises de conduite, un code qui lui permette de distinguer pratiquement l'ordre du dĂ©sordre, le vrai du faux, et cela non pas en gĂ©nĂ©ral, mais ici Ă  tout instant. Comme il ne trouve pas les normes indispensables lĂ  oĂč elles Ă©taient traditionnellement transmises, il va les demander Ă  la littĂ©rature qui, Ă  dĂ©faut de lĂ©galitĂ©, produit encore Ă  l'usage de l'individu ces figures en quelque sorte familiĂšres et transcendantes que produisait l'Ă©popĂ©e. Marthe ROBERT, L'Ancien et le Nouveau, 1963. Ainsi la polyphonie orchestrĂ©e par le narrateur dans Don Quichotte, visiblement commandĂ©e aussi par la jubilation de raconter et d'entendre des histoires, rĂ©pĂšte l'idĂ©alisme de notre chevalier en lui donnant des issues contradictoires si le dĂ©sir d'absolu de Chrysostome ne peut s'Ă©tancher que dans la mort, les amours contrariĂ©es de Lucinde et Cardenio connaissent, elles, une conclusion heureuse, mais au prix d'un dĂ©nouement que l'on jugera peut-ĂȘtre improbable. Faut-il voir ici autant d'exemples de la correction infligĂ©e Ă  la vie par le roman ? Ici encore, Don Quichotte nous laissera dans l'aporie les livres - et particuliĂšrement les romans - s'apprĂȘtent-ils Ă  constituer au XVIIĂšme siĂšcle les nouveaux repĂšres de conduite dans un monde dĂ©senchantĂ© ? Sont-ils devenus au contraire les hĂ©rauts mensongers d'une cohĂ©rence disparue ? En tout cas, la question posĂ©e par Cervantes inaugure pour longtemps un enjeu crucial. __________________________________________________________ 1. Les numĂ©ros de pages renvoient Ă  l'Ă©dition de Don Quichotte par Aline Schulman, Points Seuil, 1997. LIENS VIE, ƒUVRES Miguel de Cervantes en espagnol Vie, Ɠuvres, liens EncyclopĂ©die de l'Agora Biographie dĂ©taillĂ©e, portrait Imago Mundi Proyecto Cervantes. TEXTE L'IngĂ©nieux hidalgo Don Quichotte de la Manche avec les gravures d'HonorĂ© Daumier. Quijote interactivo BNE El Ingenioso Hidalgo Don Quijote de la Mancha texte original. ILLUSTRATIONS Don Quichotte par Gustave DorĂ© BnF Banque d'images Getty images Don Quichotte illustrĂ© Pinterest Les dessins de Dubout. ÉTUDES Le triomphe de l'imagination critique Carlos Fuentes Don Quichotte Laura Garcia Vitoria Don Quichotte David Alvarez Don Quichotte Philo-Lettres Don Quijote de la Mancha Centre virtuel Cervantes. En marge du Quichotte, par Miguel de Unamuno EncyclopĂ©die de l'Agora QuatriĂšme centenaire de Don Quichotte Lexilogos Don Quijote et Dulcinea Odile Lasserre Dempure Le Quichotte et la France, histoire d'une fascination ancestrale Ambassade de France Don Quichotte et le problĂšme de la rĂ©alitĂ© Alfred SchĂŒtz L'absurde dĂ©sir d'Ă©ternitĂ© J. M. Baldran Don Quichotte un mythe pour notre temps ? Jean Canavaggio Don Quichotte Cervantes et Cide Hamete AbbĂšs Bahous. Accueil du site Magister Vocabulaire Types de textes Genres littĂ©raires Explication de texte Le commentaire Texte argumentatif La dissertation Parcours ƒuvres intĂ©grales Dossiers BTS Liens
LesÉcuyer Seniors sont des Écuyers prĂȘts Ă  devenir des Chevaliers et apprennent les valeurs d'un Chevalier de la CdA avant de prĂȘter serment. Écuyer Le seul membre de la branche de la Capitale ayant ce rang en 2277 est Arthur Maxson , ce qui pourrait impliquer que ce rang est rĂ©servĂ© aux enfants et serait en dessous de l'InitiĂ©.
Alors que le rideau est tombĂ© sur la plupart des scĂšnes europĂ©ennes, Musica revient sur cette superbe production dont la premiĂšre a eu lieu ce printemps Ă  Paris Pretty Yende et Benjamin Bernheim faisaient alors leur retour sur scĂšne aprĂšs avoir conquis le public dans "La Traviata". Ils incarnaient cette fois, les amoureux maudits du chef-d'Ɠuvre de Massenet "Manon" Ă  l'opĂ©ra Bastille dans une version originale mise en scĂšne par Vincent Huguet."Un couple trĂšs, trĂšs moderne"Manon est une hĂ©roĂŻne libĂ©rĂ©e dans cette nouvelle reprĂ©sentation du chef-d'Ɠuvre Ă©ponyme de Jules Massenet. "Manon, en fait, c'est l'homme elle a le pouvoir tout le long," affirme Pretty soprano sud-africaine et le tĂ©nor français Benjamin Bernheim fascinent dans cette histoire d'amour dĂ©chirante qui raconte les aventures de l’irrĂ©sistible Manon et de son dĂ©vouĂ© chevalier Des Grieux. Une Ɠuvre plus actuelle qu'elle n'y paraĂźt."C'est un couple trĂšs, trĂšs moderne", estime Benjamin Bernheim. "Des Grieux accepte totalement l'idĂ©e qu'une femme soit au-dessus de lui, plus connue, plus forte,“ affirme le metteur en scĂšne Vincent Huguet a transposĂ© cet opĂ©ra dans la dĂ©cennie exubĂ©rante et libre de l'entre-deux-guerres. _"Ce qui m'a vraiment convaincu de situer l'histoire dans ces annĂ©es 20, ces annĂ©es folles, ce sont les figures de Mistinguett et de JosĂ©phine Baker surtout. C'est la premiĂšre fois dans l'histoire que des femmes ont pu devenir quelqu'un sans avoir la protection de certains hommes," _fait-il hommage Ă  Paris"Manon" de Jules Massenet qui s'inspire du roman "Manon Lescaut" de l'AbbĂ© PrĂ©vost a Ă©tĂ© jouĂ© pour la premiĂšre fois Ă  Paris en 1884. "Je crois que c'est Ă©videmment un hommage Ă  Paris il y a le petit appartement bohĂšme de l'acte II, le grand acte du Cours-la-Reine qui est tout ce qu'a Paris de festif - la Ville lumiĂšre - et ensuite, au contraire, la pĂ©nombre humide de Saint-Sulpice", explique Vincent parisienne est en effet le dĂ©cor de la scĂšne tragique oĂč Des Grieux dĂ©cide d'entrer dans les ordres aprĂšs que Manon l'a quittĂ©. Pour Benjamin Bernheim, c'est Ă  ce moment-lĂ  que le chevalier prend conscience de sa solitude et de son amour indĂ©fectible pour la belle Manon "Il est avec Dieu, mais Dieu ne rĂ©pond pas Ă  ses priĂšres. Manon, c'est comme un spot de lumiĂšre qu'il a regardĂ© trop longtemps droit dans les yeux et oĂč qu'il regarde, il y a toujours cette ombre, cette douce image qui reste," leur amour brĂ»lant, les deux amants n'arrivent pas Ă  vivre ensemble et heureux. Manon finit par ĂȘtre arrĂȘtĂ©e avant de trouver la mort. "Je me sens trĂšs inspirĂ©e par le courage dont elle fait preuve en suivant son cƓur et en rĂ©alisant ses rĂȘves, mĂȘme les plus impossibles", indique šPretty Yende."C'est comme si elle avait renoncĂ© Ă  tous ses dĂ©sirs elle peut quitter cette terre en paix en sachant qu'elle s'est créée les plus beaux des souvenirs," conclut la soprano. jfXGYsU. 128 182 298 186 164 119 260 16 337

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