Le 27 novembre 1914, deux escouades de la 1Ăšre compagnie du 298e RĂ©giment d'Infanterie sont surprises par les allemands dans une tranchĂ©e Ă proximitĂ© de VINGRĂ Aisne. Une dizaine de soldats sont pris par l' ennemi; les autres se replient dans une tranchĂ©e arriĂšre et reprennent leur position au dĂ©part des allemands. Le caporal Henry FLOCH greffier de la justice de paix Ă Breteuil, dans le civil, prisonnier des allemands, profite d'une bousculade pour s'enfuir. Vingt-quatre soldats appartenant aux deux escouades seront jugĂ©s par un conseil de guerre pour abandon de poste en prĂ©sence de l'ennemi, le 3 dĂ©cembre 1914. parmi eux se trouve Henry FLOCH, qui Ă la suite de directives du conseil de guerre prĂ©sidĂ© par le gĂ©nĂ©ral de Villaret, sera tirĂ© au sort avec cinq autres camarades pour ĂȘtre fusillĂ©. Il sera exĂ©cutĂ© pour l'exemple le 4 dĂ©cembre 1914. Ces six poilus seront rĂ©habilitĂ©s solennellement par la cour de cassation le 29 janvier 1921. On les appelle " les martyrs de VingrĂ© ". Les anciens combattants du 298Ăš rĂ©giment d'infanterie ont fait Ă©difier Ă VingrĂ© en bordure de la dĂ©partementale 138, Ă la sortie du village, un monument Ă©rigĂ© Ă la mĂ©moire de leurs six camarades fusillĂ©s. Voici l'Ă©mouvante lettre adressĂ©e par FLOCH Ă sa femme Lucie, la veille de son exĂ©cution. Elle figure avec de nombreuses autres lettres dans un recueil intitulĂ© " Paroles de Poilus " publiĂ© dans la collection LIBRIO. VingrĂ©, le 4 dĂ©cembre "Ma bien chĂšre Lucie, Quand cette lettre te parviendra, je serai mort fusillĂ©. Voici pourquoi Le 27, novembrevers 5 heures du soir, aprĂšs un violent bombardement de deux heures, dans une tranchĂ©e de premiĂšre ligne, et alors que nous finissions la soupe, des Allemands se sont amenĂ©s dans la tranchĂ©e, m'ont fait prisonnier avec deux autres camarades. J'ai profitĂ© d'un moment de bousculade pour m'Ă©chapper des mains des Allemands, J'ai suivi mes camarades, et ensuite, j'ai Ă©tĂ© accusĂ© d'abandon de poste en prĂ©sence de l'ennemi. Nous sommes passĂ©s vingt-quatre hier soir au Conseil de Guerre. Six ont Ă©tĂ© condamnĂ©s Ă mort dont moi. Je ne suis pas plus coupable que les autres, mais il faut un exemple. Mon portefeuille te parviendra et ce qu'il y a dedans. Je te fais mes derniers adieux Ă la hĂąte, les larmes aux yeux, l'Ăąme en peine. Je te demande Ă genoux humblement pardon pour toute la peine que je vais te causer et l'embarras dans lequel je vais te mettre. Ma petite Lucie, encore une fois, pardon. Je vais me confesser Ă l'instant, et espĂšre te revoir dans un monde meilleur. Je meurs innocent du crime d'abandon de poste qui m'est reprochĂ©. Si au lieu de m'Ă©chapper des Allemands, j'Ă©tais restĂ© prisonnier, j'aurais encore la. vie sauve. C'est la fatalitĂ©. Ma derniĂšre pensĂ©e, Ă toi, jusqu'au bout. Henry Floch" Cette lettre a Ă©tĂ© Ă©crite par le Caporal Henry FLOCH du 298e de Roanne qui fut fusillĂ© par l'armĂ©e française le 4 dĂ©cembre 1914 aprĂšs une parodie de procĂšs, pour l'exemple, avec cinq autres soldats, aux motifs de "dĂ©sertion et d'abandon de poste Ă l'ennemi". C'Ă©taient un des "Martyrs de VingrĂ©". Il a Ă©tĂ© rĂ©habilitĂ© le 29 Janvier 1921
Publiéle 23/02/2018 à 15h15. "Adieu mon vieux": un siÚcle aprÚs, la police marseillaise a retrouvé les descendants d'un poilu tué sur le front de la Somme, en 1915. Ici, pas d'ADN, mais la
Quatre ans d'horreur, de visions macabres et de sang qui coule. Mais aussi des heures Ă attendre dans les tranchĂ©es, des moments d'ennuis, de doutes, puis de rĂ©confort au moment de lire les mots de sa bien-aimĂ©e, son frĂšre ou sa marraine. Certains soldats de la PremiĂšre Guerre mondiale se sont mĂȘme montrĂ©s poĂštes dans la douleur, au moment de partager leurs pensĂ©es avec leurs proches. Leurs essais, ceux qui n'Ă©taient pas censurĂ©s, se sont souvent retrouvĂ©s dans la presse de l'Ă©poque, comme une chronique de la Grande Guerre, vue de l' la veille de la cĂ©lĂ©bration du centenaire de l'armistice, RetroNews, le site de presse de la BibliothĂšque nationale de France BNF, nous ouvre ses archives afin de picorer dans ces Ă©crits d'oĂč jaillissaient parfois l'espoir, l'amour et l'humour ! Lorsque tu reviendras, je te gĂąterai de caresses⊠» C'est vĂȘtu comme un ours [âŠ] ça attend sa marmite [âŠ] C'est informe, innommable et souvent plein de poux. C'est un poilu, madame⊠et c'est votre Ă©poux ! » Ce 18 aoĂ»t 1916, le journal Le Radical publie en brĂšve ces quelques lignes d'un homme Ă qui le front n'a visiblement pas enlevĂ© sa comme celui-lĂ , un certain Paquito, dont la lettre Ă sa douce - en colĂšre - est publiĂ©e dans Le XIXe siĂšcle ChĂšre petite femme, ta derniĂšre lettre m'apprend que la Censure a mis le nez dans ta correspondance et je crois deviner, Ă te lire, combien tu es ennuyĂ©e de cet accident et pĂ©niblement surprise de voir ainsi violer notre intimitĂ© et nos tendres secrets⊠HĂ©las, Mienne chĂ©rie, [âŠ] c'est la guerre ! Il n'y a plus Ă s'Ă©tonner de rien », Ă©crit d'abord le soldat, qui poursuit en imaginant, avec humour, que le censeur est peut-ĂȘtre un ecclĂ©siastique choquĂ© de leurs manifestations de tendresse⊠Et d'en conclure sa lettre en pied de nez Ă son potentiel lecteur intrus Cher trĂ©sor adorĂ©, Ă©cris-moi toujours de bien amoureuses missives qui me sont ici le meilleur souvenir des heures de bonheur que nous avons vĂ©cues. Je te rĂ©pondrai toujours. Et la peste soit sur le censeur ! Reçois, Ă sa barbe, les plus doux baisers de ton mari qui t'adore. »Avec une telle relecture, les coquineries doivent ĂȘtre discrĂštes, et imagĂ©es. Lorsque tu reviendras de tes froides tranchĂ©es, de tes boyaux sanglants, ĂŽ mon pauvre adorĂ©, pour te faire oublier tes rudes chevauchĂ©es, tes douleurs, ton cafard, ce calvaire abhorrĂ©, que je te gĂąterai de suaves caresses, que je te donnerai tous mes soins les plus doux, revivant en un jour nos premiĂšres ivresses en te couvrant, chĂ©ri, des baisers les plus fous ! » Bien qu'intitulĂ© Lettre d'une femme Ă son mari », ces quelques phrases publiĂ©es dans Le Ver Luisant en janvier 1918 ne sont que l'expression du fantasme d'un soldat poĂšte, le sergent AndrĂ© Soriac, reconnu Ă l'Ă©poque par ses pairs pour la musique de ses les Ă©crits enthousiastes des soldats sont dĂ©tournĂ©s pour faire la propagande d'une guerre qui dure⊠Comme ce 23 fĂ©vrier 1916 dans Le Matin, dans une compilation de morceaux choisis intitulĂ©e La confiance de nos soldats ». Du fond des tranchĂ©es, nous jugeons⊠» Note bien que si, pour avoir la victoire, il fallait encore se lancer dans la fournaise, nous sommes toujours prĂȘts Ă y entrer ! » aurait ainsi Ă©crit l'un d'eux. Et l'article de conclure Chacun, suivant son tempĂ©rament, exprime sa foi imperturbable en l'avenir de la patrie. »Quelques rĂ©flexions politiques filtrent toutefois. Comme ce 7 dĂ©cembre 2015 dans le journal Le SiĂšcle Du fond des tranchĂ©es, nous jugeons les Ă©vĂ©nements de notre politique extĂ©rieure en nous Ă©loignant, chaque jour davantage, du point de vue qui semble prĂ©dominer dans les milieux gouvernementaux. [âŠ] La plus abominable violence est dĂ©chaĂźnĂ©e contre nous [âŠ] En dĂ©pit des conventions internationales qu'elle avait signĂ©es, l'Allemagne emploie contre nos soldats des gaz asphyxiants, elle maltraite les prisonniers de guerre, leur donne une nourriture insuffisante, les contraint Ă des travaux de dĂ©fense contre nous-mĂȘmes [âŠ] et pourtant dans les sphĂšres dirigeantes de Paris, on affecte des scrupules pour user de reprĂ©sailles ou tirer parti de toutes les armes qui peuvent concourir Ă notre dĂ©fense », accuse un homme qui signe L'Ancien ».Et certains de partager leur rĂ©jouissance de la fin de la guerre, comme ce soldat en permission qui Ă©crit Ă un camarade restĂ© au front Je regrette presque d'avoir eu ma permission au moment de la victoire. J'aurais voulu ĂȘtre avec vous, pour entendre chuinter le dernier obus et claquer la derniĂšre balle de mitrailleuse. [âŠ] Nous aurions trinquĂ© ensemble. [âŠ] Comme j'ai pensĂ© Ă vous en lisant les journaux⊠[âŠ] Vraiment oui, vous avez dĂ» ĂȘtre heureux. L'ennemi capitule. Nous avons la victoire complĂšte. Et vous y entrerez, en Allemagne, Parbleu ! »
Lettred'un poilu Ă sa femme : "La sentence est tombĂ©e : je vais ĂȘtre fusillĂ© pour l'exemple, demain, avec six de mes camarades, pour refus d'obtempĂ©rer." *****
Le 30 mai 1917LĂ©onie chĂ©rieJ'ai confiĂ© cette derniĂšre lettre Ă des mains amies en espĂ©rant qu'elle t'arrive un jour afin que tu saches la vĂ©ritĂ© et parce que je veux aujourd'hui tĂ©moigner de l'horreur de cette nous sommes arrivĂ©s ici, la plaine Ă©tait magnifique. Aujourd'hui, les rives de l'Aisne ressemblent au pays de la mort. La terre est bouleversĂ©e, brĂ»lĂ©e. Le paysage n'est plus que champ de ruines. Nous sommes dans les tranchĂ©es de premiĂšre ligne. En plus des balles, des bombes, des barbelĂ©s, c'est la guerre des mines avec la perspective de sauter Ă tout moment. Nous sommes sales, nos frusques sont en lambeaux. Nous pataugeons dans la boue, une boue de glaise, Ă©paisse, collante dont il est impossible de se dĂ©barrasser. Les tranchĂ©es s'Ă©croulent sous les obus et mettent Ă jour des corps, des ossements et des crĂÂąnes, l'odeur est manque l'eau, les latrines, la soupe. Nous sommes mal ravitaillĂ©s, la galetouse est bien vide ! Un seul repas de nuit et qui arrive froid Ă cause de la longueur des boyaux Ă parcourir. Nous n'avons mĂÂȘme plus de sĂšches pour nous rĂ©conforter parfois encore un peu de jus et une rasade de casse-pattes pour nous rĂ© partons au combat l'Ă©pingle Ă chapeau au fusil. Il est difficile de se mouvoir, coiffĂ©s d'un casque en tĂÂŽle d'acier lourd et incommode mais qui protĂšge des ricochets et encombrĂ©s de tout l'attirail contre les gaz asphyxiants. Nous avons participĂ© Ă des offensives Ă outrance qui ont toutes Ă©chouĂ© sur des montagnes de cadavres. Ces incessants combats nous ont laissĂ© extĂ©nuĂ©s et dĂ©sespĂ©rĂ©s. Les malheureux estropiĂ©s que le monde va regarder d'un air dĂ©daigneux Ă leur retour, auront-ils seulement droit Ă la petite croix de guerre pour les dĂ©dommager d'un bras, d'une jambe en moins ? Cette guerre nous apparaĂt Ă tous comme une infĂÂąme et inutile 16 avril, le gĂ©nĂ©ral Nivelle a lancĂ© une nouvelle attaque au Chemin des Dames. Ce fut un Ă©chec, un dĂ©sastre ! Partout des morts ! Lorsque j'avançais les sentiments n'existaient plus, la peur, l'amour, plus rien n'avait de sens. Il importait juste d'aller de l'avant, de courir, de tirer et partout les soldats tombaient en hurlant de douleur. Les pentes d'accĂšs boisĂ©es, Ă©taient rudes .Perdu dans le brouillard, le fusil Ă l'Ă©paule j'errais, la sueur dĂ©goulinant dans mon dos. Le champ de bataille me donnait la nausĂ©e. Un vrai charnier s'Ă©tendait Ă mes pieds. J'ai descendu la butte en enjambant les corps dĂ©sarticulĂ©s, une haine terrible s'emparant de assaut a semĂ© le trouble chez tous les poilus et forcĂ© notre dĂ©sillusion. Depuis, on ne supporte plus les sacrifices inutiles, les mensonges de l'Ă©tat major. Tous les combattants dĂ©sespĂšrent de l'existence, beaucoup ont dĂ©sertĂ© et personne ne veut plus marcher. Des tracts circulent pour nous inciter Ă dĂ©poser les armes. La semaine derniĂšre, le rĂ©giment entier n'a pas voulu sortir une nouvelle fois de la tranchĂ©e, nous avons refusĂ© de continuer Ă attaquer mais pas de dĂ© nos officiers ont Ă©tĂ© chargĂ©s de nous juger. J'ai Ă©tĂ© condamnĂ© Ă passer en conseil de guerre exceptionnel, sans aucun recours possible. La sentence est tombĂ©e je vais ĂÂȘtre fusillĂ© pour l'exemple, demain, avec six de mes camarades, pour refus d'obtempĂ©rer. En nous exĂ©cutant, nos supĂ©rieurs ont pour objectif d'aider les combattants Ă retrouver le goĂ»t de l'obĂ©issance, je ne crois pas qu'ils y LĂ©onie chĂ©rie que je ne suis pas coupable mais victime d'une justice expĂ©ditive ? Je vais finir dans la fosse commune des morts honteux, oubliĂ©s de l'histoire. Je ne mourrai pas au front mais les yeux bandĂ©s, Ă l'aube, agenouillĂ© devant le peloton d'exĂ©cution. Je regrette tant ma LĂ©onie la douleur et la honte que ma triste fin va t' si difficile de savoir que je ne te reverrai plus et que ma fille grandira sans moi. Concevoir cette enfant avant mon dĂ©part au combat Ă©tait une si douce et si jolie folie mais aujourd'hui, vous laisser seules toutes les deux me brise le cĂ
âur. Je vous demande pardon mes anges de vous mon amour de taire Ă ma petite Jeanne les circonstances exactes de ma disparition. Dis-lui que son pĂšre est tombĂ© en hĂ©ros sur le champ de bataille, parle-lui de la bravoure et la vaillance des soldats et si un jour, la mĂ©moire des poilus fusillĂ©s pour l'exemple est rĂ©habilitĂ©e, mais je n'y crois guĂšre, alors seulement, et si tu le juges nĂ©cessaire, montre-lui cette doutez jamais toutes les deux de mon honneur et de mon courage car la France nous a trahi et la France va nous aussi ma douce LĂ©onie, lorsque le temps aura lissĂ© ta douleur, de ne pas renoncer Ă ĂÂȘtre heureuse, de continuer Ă sourire Ă la vie, ma mort sera ainsi moins cruelle. Je vous souhaite Ă toutes les deux, mes petites femmes, tout le bonheur que vous mĂ©ritez et que je ne pourrai pas vous donner. Je vous embrasse, le cĂ
âur au bord des larmes. Vos merveilleux visages, gravĂ©s dans ma mĂ©moire, seront mon dernier rĂ©confort avant la ton mari qui t'aime tant
GH7R. 167 341 75 289 119 318 333 366 279
lettre d un poilu Ă sa femme